Dans les coulisses de la direction archéo du Douaisis
Rien ne laisse présager de ce qui se déroule dans cet anodin bâtiment de la communauté dagglo. Poussons la porte Pierre Demolon, directeur des laboratoires de restauration et danalyse archéologique nous accueille, habitué à vulgariser. Les locaux ne rendent pas spécialement honneur à leurs occupants. Imaginez un hangar de la taille d'un terrain de foot et une succession de murs d'étagères allant jusqu'au plafond, remplis de cartons. Assis autour d'une grande table, une dizaine de personnes manipulent des objets avec délicatesse. Equipés de bonnets, les mains terreuses, ils pourraient rentrer d'une cueillette de champignons. Ils examinent en réalité les trouvailles d'une fouille archéologique préventive. L'activité principale de cette équipe dune petite centaine de personnes.
70 fouilleurs
« Pour Amazon et Kiabi, savoir que les terrains avaient déjà été sondés et quils navaient pas besoin dêtre fouillés a vraiment pesé dans limplantation », explique larchéologue. Car oui, vieilles pierres et développement économique peuvent aller de pair. Surtout depuis la loi de 2003, qui oblige tout aménageur à réaliser des fouilles préalables à tout projet de construction. Bête noire de nombreux promoteurs et architectes, le phénomène nest pas anecdotique : un hectare sur dix est concerné. 93 structures agréées par lEtat en France peuvent réaliser ces diagnostics : lInrap, des sociétés privées et ce service de la CAD. Avec ses 70 fouilleurs (Bac +2 et 3), sa force de frappe est très importante. Il mène en moyenne 7 à 8 chantiers par an et réalise une trentaine de diagnostics. Et ce, bien au-delà du douaisis : « au néolithique, la « CAD » ne voulait pas dire grand chose », samuse le scientifique. La direction répond à des appels doffres et preste pour des communes nayant pas la compétence. Et la rentabilité est au rendez-vous. Schématiquement, les activités de fouilles, facturées aux aménageurs, financent celles des deux labos, qui doivent encore gagner en notoriété. « Le budget annuel de la direction est de 5 M par an. Nous sommes quasi à léquilibre et latteindrons cette année », explique Pierre Demolon.
Vocation de recherche
Des labos de restauration de ce type, il nen existe quune dizaine en France et des labos danalyse, seulement deux. Toute lexpertise est là. Le premier traite entre 600 et 800 objets métalliques par an et une centaine de céramiques. Deux chercheurs sattèlent à leur redonner vie, via des procédés chimiques tels que des bains qui peuvent durer jusquà six mois. Les laborantins travaillent actuellement à une commande de la ville de Reims : « ça va dune cruche trouvée dans une sépulture gallo-romaine à un fer à cheval du moyen-âge », raconte le maître des lieux. Le labo danalyse a quant à lui vocation de recherche. Deux spécialistes tentent de comprendre lusage des objets découverts, et améliorent ainsi la connaissance des époques concernées. Sa gestation fut plus longue. Il a pu voir le jour grâce aux très bonnes relations de Pierre Demolon avec différents organismes, comme les Mines de Douai, qui a donné des appareils, certes vétustes mais aussi pointus que coûteux. Parmi lesquels un microscope grossissant jusquà 60 000 fois. « On trouve un paquet de rouille, bon ! Avec cet outil, on arrive à savoir quil sagit dun creuset de fondeur, de telle période », explique larchéologue. Le labo collabore avec plusieurs universités avec un objectif : être reconnu comme Institut de recherche. Un sésame vers lagence nationale de la recherche et ses financements. « Nous avons du matériel de pointe, mais pas assez dhommes à mettre devant », regrette simplement Pierre Demolon.
Marie Raimbault
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