Aliphos met la clé sous la porte

En juin 2018, le groupe belge Ecophos inaugurait en grande pompe dans un grand événement sa première usine française de Loon-Plage. En juin 2018, le groupe belge Ecophos inaugurait en grande pompe dans un grand événement sa première usine française de Loon-Plage.

Quasi neuve, l'usine de phosphates pour alimentation animale Aliphos, à Loon-Plage, est liquidée. Ainsi en a décidé le tribunal de commerce de Dunkerque, faute de repreneurs. Une énorme déconvenue pour cet investissement majeur de 85 M€. 47 salariés sur le carreau.

C'est un fiasco industriel incroyable. En juin 2018, le groupe belge Ecophos inaugurait en grande pompe dans un grand événement sa première usine française de Loon-Plage. Un investissement de 85 M€ pour ériger un outil industriel de grande envergure capable -sur le papier- de produire 200 000 tonnes de phosphates de grande qualité à destination de l 'alimentation du bétail. Le dirigeant, Mohamed Takim, est un chimiste de génie qui a multiplié les brevets depuis ses 18 ans et qui se veut visionnaire sur un marché en voie de raréfaction de la ressource.Son objectif est alors clair : devenir numéro un mondial du secteur.

Mais rien ne va se passer comme prévu : l'un des ingrédients de la recette voit son prix flamber à tel point qu'Aliphos doit trouver des formulations alternatives, qui généreront à la fois des surcoûts et des délais. La production ne dépassera jamais 47 000 tonnes. "Monsieur Takim a été trop gourmand, il aurait du se focaliser sur une seule usine", déplore Laurent Loyer, représentant CGT du CSE.

Autre mauvaise surprise : de nouveaux opérateurs se positionnent sur le marché, à des prix très bas, entraînant une chute de 30 à 40% des prix des phosphates. Une équation impossible pour la jeune entreprise, et pour le groupe Ecophos (basé à Louvain-La-Neuve), mis en faillite en mars dernier.
Aliphos, elle, est seulement placée en redressement judiciaire avec, à l'époque, une grande confiance sur l'avenir. « J'étais extrêmement optimiste et le tribunal de commerce aussi », se souvient Jean-Philippe Loy, directeur de l'usine. De fait, pas moins d'une trentaine de marques d'intérêt se font jour alors. Mais la malchance perdure avec l'instauration du confinement : de nombreux investisseurs internationaux ne pouvant pas se rendre sur place, ne donnent pas suite.

Au final, seuls 10 visites ont eu lieu, et ont donné lieu à trois offres de reprise. L'une par le fondateur d'Ecophos lui-même, comme la loi lui permet de façon provisoire, Indaver, et un groupe anonyme représenté par un cabinet d'avocat. Mais aucun des trois candidats n'a pu déposer une offre recevable car l'Etat demande le dépôt d'une garantie financière de 17 M€ pour traiter les co-produits de la production (des résidus de roche). L'Etat considère ces produits comme des déchets, tandis que la direction estime pouvoir les vendre comme engrais.

Résultat, le tribunal n'a pu que prononcer la liquidation et le licenciement des 47 salariés (auxquels s'ajoutent autant d'emplois induits).

Restent désormais les actifs industriels, flambant neufs ou presque, qui pourraient susciter des convoitises. « Si l'offre de Monsieur Takim était retenue, ce site a un avenir, qui pourrait intervenir dès 2021, après une remise à niuveau de six mois. Si c'est un autre industriel pour d'autres activités, il faudrait deux à trois ans pour les autorisations », analyse Jean-Philippe Loy.