Alstom-Bombardier : un mariage à gros enjeu régional

Le petit monde du ferroviaire est en ébullition après l'annonce du rachat de Bombardier Transport par Alstom. a priori, les énormes carnets de commande de leurs deux usines régionales les mettent à l'abri à moyen terme.

« Alstom annonce aujourd’hui la signature d’un protocole d’accord avec Bombardier Inc. et la Caisse de dépôt et placement du Québec (« CDPQ ») pour l’acquisition de Bombardier Transport. » Le mariage Alstom-Bombardier annoncé aujourd'hui par le groupe français aura-t-il un meilleur sort que le projet précédent Alstom-Siemens, avorté suite au véto de la commission européenne au nom de la concurrence? Qui vivra verra. En attendant, le projet d'acquisition permettrait à Alstom de doubler de taille pour atteindre 15,5mds€ de chiffre d'affaires, avec un carnet de commandes énorme (75 mds€) et répondre ainsi à une concurrence de plus en plus menaçante du mastodonte chinois CRRC (28 milliards de dollars de ventes).

Outre sa dimension mondiale, le rapprochement a évidemment un impact très fort en région, première région ferroviaire française. Car les deux constructeurs y disposent chacun d'une usine majeure, à 20 minutes de voiture l'une de l'autre. Le groupe canadien a la plus importante à Crespin avec 2000 salariés tandis qu'Alstom Transport emploie 1300 personnes à Petite Forêt, dont la moitié de cadres et ingénieurs, sans compter 240 intérimaires. L'usine, en pleine montée en charge, est d'ailleurs en cours de recrutement, avec 150 embauches programmées en 2020 après 250 recrutements de CDI l'an dernier. Si l'usine Bombardier tourne elle aussi à plein régime, la maison-mère dont le siège est à Berlin affiche en revanche un endettement considérable qui justifiait de trouver une solution rapide.

Priorité à la mobilité intelligente


C'est tout l'écosystème qui est se trouve concerné par ce projet, sachant qu'Alstom seul travaille avec 200 fournisseurs dans la région, et qu'un emploi chez le constructeur en génère environ 3 chez ses fournisseurs. Et Alstom escompte bien des économies, qui pourraient se chiffrer à « 400 M€ de synergies de coûts par an à partir de l'année 4 ou 5 ». Des doublons risquent-ils du coup d'être supprimés, des sites fermés, des fournisseurs concentrés ? « Il n'y a pas de redondances à éliminer, surtout dans le Nord de la France où nos deux usines sont chargées comme des oeufs, avec une visibilité de quatre à cinq ans», démine d'emblée Henri Poupart-Lafarge, président du conseil d'administration et directeur général d'Alstom, dans une interview aux Echos. Côté syndical, la tonalité est dans l'ensemble plutôt positive. Il faut dire qu'on est loin de la situation d'il y a deux ou trois ans quand on voyait la production décliner peu à peu sans relais de croissance. La CGT Bombardier s'est toutefois dite inquiète de possibles doublons dans le domaine de l'ingénierie.
On relèvera que l'opération arrive au moment où Transalley, l'écosystème organisé sur le campus de l'université de Valenciennes autour de la mobilité innovante, entre à maturité. Une véritable opportunité alors qu'Henri Poupart-Lafarge met précisément l'accent très fortement sur ce sujet.

Cette acquisition « améliorera significativement notre capacité d’innovation, pour nous positionner en pointe en matière de mobilité intelligente et durable», a-t-il déclaré. Il reste toutefois une longue phase d'instruction puisque l'acquisition devrait être finalisée seulement au premier semestre 2021





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