Bureaux : Lille, une fiabilité toujours intacte ?

Bien que fortement ralenti par la crise, le marché tertiaire lillois a su faire preuve de résilience. Qu’en sera t-il demain ? La reprise progressive de l’activité économique entraîne dans son sillage un redémarrage à tâtons des transactions. Suffisant pour alimenter un optimisme affiché des professionnels du bureau.

2021 : crise, convalescence ou reprise pour le marché de bureaux lillois ? Avec ses presque 140 000 m2 placés l’an dernier, Lille a réussi à conserver sa deuxième place du podium des marchés tertiaires régionaux après Lyon. Freinée par la crise sanitaire, l’activité a tout de même fait preuve d’un certain dynamisme en 2020, porté essentiellement par les Pme. Les gros deals ont à l’évidence fait défaut, puisque seules trois signatures ont été réalisées pour des programmes immobiliers de plus de 2 500 m2 « L’absence de grandes transactions n’est pas à prendre comme un abandon des projets. C’est un report dans le temps, donc nous ne sommes pas inquiets », indique Hugues Laffineur, associé fondateur du cabinet Tostain & Laffineur.

« Les Pme ont cette agilité à rebondir plus vite, à prendre des décisions plus rapidement, ajoute Rodolphe Monnier, directeur de JLL Lille, spécialiste en conseil en immobilier d’entreprise. Les grands groupes sont en pleine réflexion quant à l’utilisation qu’ils auront de leurs bureaux demain. » Avec une attention toute particulière portée au télétravail et au coworking dans le quotidien de leurs salariés. Le tout, dans une logique de rationalisation à la fois des mètres carrés et des coûts. « Ils relanceront leurs projets, dès cette année, mais avec quelques ajustements, poursuit Rodolphe Monnier. Il y a un peu plus d’un an, lorsqu’on imaginait des programmes de 15 000 m2, aujourd’hui on se positionne plus aux alentours de 9 ou 10 000 m2 ».

« Les grosses boîtes ont été plus prudentes et avec la Covid, beaucoup de gens travaillaient chez eux. Cette année, ces grandes entreprises attendent encore les décisions à venir car nous sommes encore en crise, estime pour sa part le directeur de l’OBM André Bartoszak. Tout le monde est dans l'expectative avec le télétravail. sans la Covid, 2020 n'aurait de toute façon pas été une année record. »

L’ombre d’une reprise

Malgré une baisse de régime imposée par le contexte sanitaire, la confiance qu’accordent les professionnels du secteur à Lille semble inébranlable. Tous ceux que nous avons interrogés misent sur une reprise en 2021. Selon eux, le marché tertiaire devrait être un exercice en-deçà du niveau record de 2018 (300 000 m2 placés), mais au-dessus de la moyenne décennale avec près de 200 000 m2 placés. « Nous pouvons compter sur un socle solide que constituent les Pme, précise le directeur régional de CBRE Patrick Duez. A cela, s’ajoutent les comptes propres, qui ne sont pas négli- geables sur le marché, qui auront également un vrai rôle à jouer. Enfin, d’ici là, les grands donneurs d’ordres auront repris un peu de couleur. » « Le marché tertiaire peut rapidement reprendre un rythme de croisière grâce aux grandes transactions », ajoute le directeur de JLL Lille. Qui prévoit 100 000 à 120 000 m2 de grosses transactions potentielles dans l’année ou courant 2022. Après un démarrage « encourageant » au premier trimestre, Hugues Laffineur pressent « une année 2021 tout à fait correcte. Et du mieux l’année suivante, avec un niveau proche voire au-delà de celui de 2018-2019 ».

> A lire aussi : Bureaux - 2020, une année hors norme

Un marché compétitif

Lille n’a donc pas dit son dernier mot. La capitale des Flandres dispose encore d’atouts séduisants aux yeux des utilisateurs et des investisseurs. En effet, outre son marché tertiaire sain, Lille demeure prisée pour son positionnement géographique, son faible taux de vacance (5%), et surtout son offre qualitative à prix attractifs. « Les loyers n’ont pas baissé pendant la crise et il n’y a pas de prévision à la baisse. C’est rassurant pour les investisseurs. Le marché lillois fait partie de leur stratégie, et ce depuis des années. Il n’y a pas de raison que ça change ! », assure Rodolphe Monnier. « Lorsque l’on voit des offres à 240 € du m2 à Euralille, contre 600 € pour une tour à Paris, il n’y a pas photo !, renchérit le cofondateur de Tostain & Laffineur. La reprise sera compliquée pour les entreprises. C’est le moment pour elles de faire des économies. » Il pourrait donc y avoir une transhumance de Paris vers Lille, motivée par une prise de conscience des chefs d’entreprise.

Objectif 2023

Désormais, tout l’enjeu est de préparer demain. Le ballet des grues observé en 2018-2019 permet aujourd’hui une offre disponible et utilisable sur le champ. En 2019, le stock livrable à trois mois était de 80 000 m2, un niveau passé à 100 000 m2, d’après André Bartoszak. « Le challenge pour Lille est qu'il va falloir être très circonspect dans les deux ans, pour voir l'augmentation des rythmes, l'évolution des stocks et celle des lancements de programmes », dit-il. Des programmes en blanc devront être lancés dès à présent pour répondre à la demande à partir de 2023. Pour Patrick Duez, « les investisseurs sont prêts à investir massivement. Nous avons des signaux positifs d’un retour progressif à la normale, donc les développeurs se doivent d’être au rendez-vous ». Avec des immeubles toujours plus qualitatifs, plus ouverts sur l’extérieur, faisant la part belle aux espaces communs, favorisant l’échange et les collaborations en mode projet. Une tendance de fond déjà observée il y a quelques années, accentuée avec la crise.

> A lire aussi : Bureaux - Guillaume Pellegrin (Newton Offices) : “Le marché de Bureaux est en pleine réinvention”