Frédéric Demeyère, PDG : «Mon rêve ? Devenir le Zara du meuble»
Le dirigeant de Demeyère expose sa stratégie à Eco121.
Vous avez connu une crise familiale en 2012. Comment en êtes-vous sortis ?
A cette époque, mon frère Bernard alors président du directoire m'a annoncé son intention de délocaliser la production. Je m'y suis opposé en proposant une nouvelle vision de l'entreprise. Nous étions alors dans une stratégie volume/coût. Mais ce qui a porté la croissance des années 90 à 2000 fonctionnait moins bien. Mon projet se résume en deux mots : «fast furniture». Là où la stratégie des économies d'échelle nous imposait d'avoir une taille importante pour peser, ma perception est qu'aujourdhui ce n'est plus un problème de taille, mais de rapidité. Nous devons être au fait des besoins de nos deux clients: le distributeur et le consommateur. Et ce dernier zappe. Nous sommes en train de vivre ce que le textile a vécu dans les années 70. A nous d'être en capacité d'être dans l'air du temps et de proposer des produits bon marché. Nous devons mobiliser les femmes et les hommes pour créer une gamme large et disponible permettant au plus grand nombre de se meubler tendance. Mon rêve est d'être en capacité de devenir le Zara du meuble.
Avez-vous réglé vos soucis de gouvernance ?
Elle est sous contrôle après une reconfiguration au décès de mon père en 2013. Nous sommes huit actionnaires avec mes frères et soeurs et ma mère, avec la volonté de rester dans un actionnariat familial. Ensemble avec la troisième génération que sont nos enfants, nous réfléchissons à la succession. L'ouverture reste cependant une question. Nous aurons besoin de capitaux pour encore grandir et nous envisageons toutes les pistes, pourquoi pas en ouvrant le capital à un partenaire non familial. J'y vois des avantages et je souhaiterais également élargir notre gouvernance à des administrateurs indépendants. L'entreprise familiale a parfois des difficultés à se remettre en question et nous avons toujours fonctionné sur un conseil d'administration clos. La réalité d'aujourdhui et la nécessité de regarder notre monde avec des angles de vues différents m'amènent à penser qu'un conseil dadministration doit comporter des gens externes sans affect familial. Rien n'est entérine?, mais beaucoup de changements interviendront dans un horizon de 3 à 5 ans.
Quelles sont vos ambitions ?
220 M€ de chiffre daffaires en 2020 dégageant un Ebitda de 10%, 5% les années plus difficiles, 15% les meilleures. Je ne doute pas qu'il y en aura. A nous de les construire. Comment y parvenir ? Avec cette stratégie du fast furniture. Nous venons d'investir 3,5 M€ dans un bâtiment de 6 000 m2 pour stocker nos panneaux de particules et nous doter dune scie pour ne plus être dépendant de certains fournisseurs et gagner du temps. Nous renouvelons un tiers de notre collection par an et je souhaite passer à trois collections annuelles.
Est-ce que cela s'accompagnera de création d'emplois en région ?
Oui mais pas que. Nous avons également un bureau d'achat à Shenzhen et une usine au Vietnam, MDV, Meubles Demeyère Vietnam, qui réalise des opérations gourmandes en main duvre qui ne seraient pas économiquement viables ici. Cela nous permet de réaliser des produits avec un mix de produits réalisés en France et au Vietnam. Une double approche unique au monde.
Selon vous, y a-t-il des freins en France qui empêchent les Pme de devenir ETI ?
Je crois que nous avons tendance à idéaliser le passé. Évidemment qu'il y a, et depuis toujours, des freins mais c'est aussi ce qui rend le challenge attractif. En France, on aime aussi dire qu'on est des zéros ! Je suis désolé mais on a de vrais atouts! Regardons davantage notre qualité de main d'oeuvre, nos infrastructures extraordinaires, une situation géographique excellente. Aller vendre en Angleterre c'est au bout de la rue! A nous chef d'entreprise d'être à la hauteur de ces enjeux.
Recueilli par Julie Dumez
- A voir aussi : la visite de l'usine des Meubles Demeyère à Pérenchies
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