Interview de Laurent Degallaix : “ On n ' a plus besoin de montrer nos papiers !”

Comment se positionne votre territoire par rapport à la capitale régionale ? Quel est le sens du pôle métropolitainqui se met en place ?

Ce pôle est resté très longtemps en association de préfiguration. Il a pris un virage et est maintenant un syndicat mixte ouvert, dans lequel peuvent entrer la Région et le Département. On a un potentiel de territoires de 9 EPCI soit 750 000 habitants, ce n'est pas neutre. Ce pôle se fait les dents avant de s'orienter sur une structuration différente à la mandature suivante.

De quoi mettre fin au Yalta local ?

On sait bien qu'on a Valenciennes Métropole et la Communauté d'agglomération de la porte du Hainaut parce qu'il a fallu à un moment donné faire un découpage politique qui préservait le territoire des deux lions qu'étaient AlainBocquet et Jean-Louis Borloo.Mais géographiquement, on se pose la question de l'utilité opérationnelle à laisser deux agglomérations. On a ces derniers temps très fortement renforcé notre coopération. Avec leurs fortes densités, elles ont suffisamment d'habitants (350 000) pour créer une communauté urbaine (le seuil est de 250 000 pour une communauté urbaine, de 400 000 pour une métropole, ndlr). En ajoutant une petite agglo,on peut créer une métropole.

Le sujet est-il sur la table des élus ?

C'est une question que se pose le président du pôle métropolitain ! Ce n'est pas forcément partagé aujourd'hui, mais c'est une réflexion que nous aurons forcément à la prochaine mandature. C'est une façon de peser demain vis-à-vis de Lille, et de l'obliger à avoir un regard sur les autres. Même si l'agglomération de Valenciennes n'en a pas tellement besoin. Nous avons une grande capacité d'attractivité, Valenciennes est le phare dans la nuit du sud du département. Quand les investisseurs s'engagent, ils vont sur Lille, et s'ils n'y arrivent pas, ils viennent facilement sur Valenciennes. Notre bonheur, c'est que parfois ils viennent directement chez nous.

Dans les médias nationaux,Valenciennes, c'est Ascoval. Au-delàde ce sujet sensible, comment va l'économie locale ?

Ascoval est une usine ultra-performante, avec une compétence extraordinaire. L'agglomération a pris toute sa part. Avec les sous-traitants, vous touchez 500 à 600 familles aisément. A Valenciennes, on croit dans l'industrie. Mais c'est aussi au cœur de nos préoccupations de ne pas êtrefragilisés par une seule orientation. Le numérique prend une part de plus en plus importante avec des pépinières un peu partout, notamment sur les Rives Créatives. Ce parc d'innovation de 26ha est le premier pôle français des métiers de la création numérique (Rubika). On est un pôle d'excellence reconnu où Dreamworks ou Pixar viennent faire leurs courses! On est en phase ascendante, on construit des bâtiments complémentaires, avec un partenariat renforcé avec la CCI Grand Hainaut.

L'économie en tire-t-elle déjà les fruits ?

On a un savoir-faire terrible, il faut le faire savoir beaucoup plus. On a un problème fort de communication. Le territoire se porte plutôt pas mal. Toyota continue à recruter (500), Altimance (200) et Skill & You a également besoin de 200personnes.

Paradoxalement, notre taux de chômage est encore important car on n'arrive pas à faire la maille entre l'offre et la demande, même en axant les recrutements sur le savoir-être plus que sur la formation. Quand on regarde les offres d'emploi, on se dit qu'il y a de quoi faire baisser notre taux de chômage, de 14,5% aujourd'hui, de 4 à 5 points !

Le territoire a accueilli d'énormes dossiers comme GSK et Toyota. Etes-vous toujours en lice pour les projets « internationalement mobiles » ?

C'est un travail que nous sommes en train de mener. La concurrence est de plus en plus grande. Pas seulement sur le territoire des Hauts-de-France. Ce qui fait la différence, c'est l'expérience qu'on a. On n'apas besoin de montrer nos papiers !

Ensuite il faut montrer l'envie, et je m'implique personnellement dans les dossiers d'implantation, que ce soit pour 30-50 emplois ou pour 1 000 ou 2 000. Je vends le territoire dont je suis le VRP. Ensuite, si tout se passe bien, il faut encore avoir l'offre adéquate. C'est tout le travail qu'on mène dans le PLUI à l'agglo, essentiellement avec les agriculteurs, pour récupérer de la maîtrise foncière. On a déjà quelques hectares sur le site de Toyota, qui permettraient d'être présents sur un projet qui aurait besoin de 30-40 hectares. Mais il faut déjà être sur le coup d'après. L'objectif est de dégager à terme plus de 250 hectares.

Quid ducommerce de centre-ville ?

Tout le monde veut des commerces de centre-ville, mais tout le monde va en grande surface oucommande sur Internet. On est un peu moins touchés, mais on a quelques poches difficiles. Sur notre axe central, soit 500 mètres de linéaire, on a une seule boutique fermée. Mais derrière, ça souffre plus. Nous sommes parmi les 227 villes retenues dans le cadre du projet cœur de ville, on travaille avec la CCI sur la revitalisation du centre-ville; on travaille sur d'anciennes friches pas loin de l'hôtel, l'ancien Match, l'endroit devient un beau coeur de ville. Le rachat de la caserne à l'Etat, pour un prix raisonnable (1,2 M€) nous a permis de le revendre au même prix pour faire de ces 15 000m2 un vrai point d'attraction, complètement ouvert sur laville, avec des logements à l'étage et des cellules au rez-de-chaussée. Nous aurons les Sablons valenciennois, sur le modèle de Bruxelles, avec des boutiques d'antiquaires qui seront ouvertes le week-end. La Ville a également pris 500m2 pour en faire un musée des arts régionaux, ouvert le week-end aussi.

Valenciennes peut-elle devenir une destination touristique ?

On ne mesure pas l'impact que va avoir l'ouverture de l'hôtel Royal Hainaut ! C'est immense, avec un gastronomique italien, un bistrot, un spa, il n'a pas fait les choses à moitié, sur une surface gigantesque. L'hôtel en lui-même va être un lieu de destination. Il démarre d'ailleurs par la coupe du monde de football féminin. Nous aurons 6 matches à Valenciennes. On n'adosse pas un hôtel à des activités existantes, on crée un hôtel et on y adosse des activités. L'extension du golf est dans cet esprit là, car il y a un tourisme golfique. C'est un projet à 19M€, hors cessions foncières.Avec la vente des terrains, il coûtera in fine 6 à 7M€ à l'agglo. Vous avez aussi la scène nationale du Phenix, où nous investissons 8M€ pour moderniser et donner un second souffle après 20 ans. On construit un centre aquatique, pour 34M€ sur les friches de l'ancien stade Nungesser. Il y aura une fosse de plongée unique de 20mètres, semi-enterrée. L'ouverture est programmée en octobre prochain avec une centaine d'emplois. On verra sur le parking des plaques du 59, du 62, du 80, de la Belgique, car on viendra de partout. On peut imaginer qu'ils viendront faire de la plongée, manger au gastro le soir, pourquoi pas vivre l'expérience d'une nuit dans une chambre unique.

 

Avec la Cité des Congrès, l'hôtel, le golf, le centre nautique, le stade, est-on arrivé au moment de cristallisation d'une nouvelle attractivité de Valenciennes ?

Cela contribue à asseoir l'image de Valenciennes. Maintenant, il faut faire vivre tout ça, avec des compétitions de golf, des opérations d'envergure au musée... Je ne veux pas qu'on ait -pardon à mes amis lensois -l'image de Lens où, une fois que les gens ont visité le Louvre, la seule envie est d'aller à Arras pour le tourisme de mémoire ou à Lille pour tout le reste.

Comment pouvez-vous financer tous ces équipements ?
Valenciennes Métropole, ce sont quand même 50 M€ d'investissements par an. C'est le fruit d'une gestion très serrée en fonctionnement. Nous avons 135 équivalent temps plein. La moindre agglo de même niveau, c'est multiplié par deux ou trois. Notre force est là. On est résolument orienté vers l'investissement, on n'a jamais mis le doigt dans le fonctionnement des communes.