Hubert Tondeur est le nouveau président du conseil de l'ordre des experts comptables de la grande région, au moment où se prépare une crise économique sévère. L'occasion de comprendre les enjeux de la profession dans ce contexte très particulier.

 

Il aura fallu attendre six ans depuis les premières approches jusqu'à la fusion des conseils de l'ordre des experts comptables en France. Hubert Tondeur était déjà président à l'échelle du Nord-Pas-de-Calais, il rempile à l'échelon des Hauts-de-France, qui compte pas moins de 1250 professionnels sans compter les 400 stagiaires (période de 3 ans avant la titularisation).

Quelle différence entre la présidence Tondeur 1 et la présidence Tondeur 2 ? « C'est moins une fusion qu'un regroupement. Personne n'absorbe personne. Il s'agit de rendre un meilleur service à nos membres ». Un conseil de l'ordre a plusieurs missions : gérer la liste des experts-comptables, les stages, mais aussi les litiges entre professionnels ou entre professionnels et clients. « On en fait beaucoup, cela permet de trouver des solutions quasiment toujours ». Le conseil de l'ordre accompagne aussi les confrères, sur un métier en pleine évolution . « La technique rentre très vite dans nos métiers, qu'il s'agisse des factures électroniques aujourd'hui ou de la TVa identifiée à la source demain ». Une évolution souhaitée, pour permettre de dégager plus de temps à l'accompagnement des clients. « Nos cabinets sont encore beaucoup trop orientés sur la saisie, il est très important d'aller dans cette direction », souligne Hubert Tondeur.

Zone dangereuse

C'est d'autant plus vrai dans la période actuelle, marquée par une incertitude considérable des entreprises sur leur avenir, spécialement dans certains secteurs plus touchés par la crise sanitaire que les autres. « Dès la semaine qui a suivi le premier confinement, nous avons signé une convention avec le tribunal de commerce », rappelle le président, inquiet de l'état des finances des entreprises. « Le vaccin sera la condition de la reprise, mais il faut aussi reconstituer les stocks, ce qui nécessite du BFR. or les entreprises ont désépargné car il a fallu mettre de l'argent. On a vu des clients aller chercher dans leur épargne personnelle... » Une situation dangereuse quand les entreprises ont déjà signé un prêt garanti par l'Etat (PGE) qu'il faudra rembourser un jour avec du fonds de roulement. Hubert Tondeur, qui rappelle que la plupart des chefs d'entreprise ont des revenus modestes, estime que les experts-comptables sont bien placés pour leur montrer qu'ils entrent en zone dangereuse et peuvent envisager des procédures de type mandats ad hoc ou conciliation. « Vous gardez la gestion de l'entreprise, mais quelqu'un est mandaté, vous aide et peut négocier », expose-t-il, en soulignant la tension psychologique qui s'accroît chez les patrons dont l'entreprise est souvent le fruit de toute une vie de labeur.

Etat d’esprit collectif

Après la mise sous perfusion des entreprises, y aura-t-il un effet domino à la fin des dispositifs d'aide ? Hubert Tondeur craint un effet de rattrapage après des mois de mise entre parenthèses des défaillances. « L'économie a été mise en coma artificiel et sous tente à oxygène. Les échéances à 5 ans des PGE sont-elles supportables ? Ce n'est pas certain. Faudra-t-il un décalage d'un ou deux ans ? Certainement. » Entre les services de l'Etat, de la Région, des consulaires, le représentant des experts-comptables se félicite de l'état d'esprit collectif qui règne dans les Hauts-de-France pour faire face. « On se connaît très bien, on peut se dire les choses, on trouve les lieux pour les messages politiques et pour les réponses techniques ». Reste à faire repartir la machine économique. Hubert Tondeur s'inquiète du manque de perspective, de visibilité et de confiance. Mais il rappelle aussi la réactivité de l'économie française au troisième trimestre, avec un rebond qui en avait surpris plus d'un.