Philippe Depasse : “Les collectivités doivent être plus proactives !"

Quel est l'état du marché de la promotion immobilière sur la métropole lilloise ? L'aboutissement des projets Grands Moulins de Paris ou de la Maillerie à Croix semble montrer une vraie dynamique...
Le marché bénéficie de deux grands soutiens, les taux d'intérêt bas et le dispositif Pinel, qui a été prolongé 4 ans. Ce sont deux filets de sécurité qui font que les promoteurs n'hésitent plus à s'attaquer à des projets de longue haleine. Ces deux dossiers débouchent en même temps, c'est une coïncidence, au moment où le marché est plus porteur et où les investisseurs peuvent s'endetter à coût bas.

 

Le secteur du bureau lillois est très dynamique. Qu'en est-il de la promotion immobilière ?
Depuis 20 ans, le marché s'établit entre 3000 et 4000 logements par an. Mais la concurrence est de plus en plus rude. Nous étions 15 professionnels à la Fédération de la Promotion Immobilière (FPI) il y a dix ans, nous sommes 33 aujourd'hui. Cette tendance est nationale avec l'arrivée de family offices ou encore d'opérateurs régionaux qui deviennent nationaux. Cette pression concurrentielle réduit la rentabilité du marché. Mais Lille n'est que la 8e métropole de France dans ce domaine, derrière Nantes, Montpellier ou Bordeaux, par exemple. La démographie est plus faible ici, tout comme le pouvoir d'achat. Il faut que les collectivités en prennent conscience. Or, avec les seules évolutions sociologiques, la baisse du nombre de personnes par foyer, il faut construire, ne serait-ce que pour maintenir sa population.

Les collectivités ne sont pas assez à l'écoute, selon vous?
Elles doivent être plus facilitatrices, plus proactives, pour compenser nos faiblesses. On est à l'époque de la communication, avec parfois une forme de méthode Coué. A la fin de l'année, je regarde les chiffres. On est à 4000 logements, Lyon est quasiment à deux fois plus. Il faut se prendre davantage en mains.

Comment ?
Je loue la qualité du dialogue qui existe, mais je suis beaucoup plus critique sur la vitesse de sortie des dossiers. Il faut au moins 2 ou 3 ans. Le temps de l'administration et des politiques n'est pas le temps économique. Il y aurait des moyens d'accélérer. La MEL est prisonnière de ses habitudes, à savoir de trop mettre en avant la forme sur le fond. On a mis en place avec la SEM Ville Renouvelée une belle initiative de workshop sur le quartier de l'Union. On a réuni tous les promoteurs dans une pièce, ce qui a produit une émulation. Si la Sem avait pris le chemin habituel, ça aurait mis un an, là, elle a mis un mois. De manière partenariale, on arrive à faire sortir des projets beaucoup plus facilement, tout en respectant les règles de la concurrence. De longues procédures ont un autre inconvénient : on dépense énormément d'argent dans les images de synthèse, les maquettes, pour arriver au final à un seul lauréat.

Les professionnels se plaignent de longue date d'un manque de foncier. La situation s'est-elle améliorée ?
Non, ça ne va pas mieux, mais pour des raisons qui sont nationales. Les Français sont égoïstes : ils veulent bien des équipements ou des nouveaux logements, mais pas dans leur rue ! Ils admettent peu la densification. Ce qui place les élus dans un étau, pour ne pas passer pour des « rois du béton ». Le futur PLU, qui sera opérationnel au second semestre 2019, traduit cette pression des habitants : certains maires ont mis des dispositions de hauteur, d'emprise au sol. On peut aussi avoir des délais de pré-instruction qui annulent les efforts nationaux de réduction des délais d'instruction des permis

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