Protéger les emplois : au-delà du chômage, la question des inégalités salariales

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Depuis une dizaine d’années, les travers du système français de protection des emplois ont fait l’objet de nombreuses discussions, rapports et tentatives de réformes. Le marché du travail français se caractérise par une forte dualité, avec d’un côté les travailleurs en place, « insiders » du système, bénéficiant de contrats à durée indéterminée fortement protégés, et de l’autre des travailleurs jeunes et/ou peu qualifiés alternant périodes de chômage et contrats à durée déterminée, représentant 15% des emplois. Selon l’OCDE, la France se classe en effet parmi les pays qui protègent le plus ses emplois en CDI, puisque parmi les vingt pays étudiés, seule l’Espagne fait état d’un indice de protection supérieur, pays qui, au-delà du chômage, est également particulièrement concerné par la précarisation des emplois, les entreprises se reportant massivement sur les CDD (29% des emplois concernés).

 

Cette typologie de protection des emplois, si elle garantit la stabilité des « insiders », pose donc le problème de la conversion des CDD en CDI, de l’accès aux emplois durables. Des tentatives de réformes ont été initiées en France depuis dix ans, au travers du contrat nouvelle embauche (CNE), abandonné depuis, et de la possibilité de rupture conventionnelle, dont le succès est mitigé, et qui ont toutes deux consisté à réformer à la marge le dispositif en réduisant le coût de séparation anticipé par les entreprises. Une réforme plus en profondeur ou plus radicale est délicate à envisager dans la mesure où la majorité des travailleurs « insiders » profitent du système actuel.

 

Une dimension d’analyse reste toutefois peu étudiée : celle des inégalités salariales. Dans le contexte d’un système dual tel que le nôtre, la politique de recrutement d’une entreprise comprend deux facettes interdépendantes : le salaire et le type de contrat, CDI ou CDD. Du point de vue du travailleur, une mobilité vers un autre emploi peut s’avérer intéressante soit parce que le salaire proposé est plus élevé, soit parce que le contrat est qualitativement meilleur (passage d’un CDD à un CDI), ou les deux. Ce levier existe également en interne pour une entreprise qui a initialement embauché en CDD. A l’inverse, dans un système anglo-saxon où la protection des emplois est quasi inexistante, le levier du contrat ne peut être mobilisé par les entreprises, puisque de facto il n’y a pas de différence notable entre CDD et CDI.

 

Dans ses travaux récents, le pôle économie de l’EDHEC souligne le poids de cet argument dans l’explication des différences d’inégalités salariales entre les pays de l’OCDE. Théoriquement, dans des pays à faible protection des emplois, les inégalités salariales sont plus importantes car le seul levier de promotion est le salaire. Cet argument tend à accentuer la dispersion des salaires, en tirant vers le haut le niveau des rémunérations. A partir d’un panel regroupant une quinzaine de pays sur plus de vingt ans, l’étude empirique menée confirme ce point de vue, en attestant une relation négative entre les indicateurs d’inégalités salariales et le degré de protection des emplois en CDI. Cette moindre inégalité salariale dans les marchés du travail duaux ne permet pas de conclure à une moindre inégalité de revenus. Il faut en effet prendre en compte la succession des phases d'emploi et de chômage des CDD, leurs durées et le mode de calcul des indemnités chômage.

 

Ce constat suggère, comme cela a déjà pu l’être pour d’autres outils de régulation du marché du travail, que choisir le degré de protection des emplois revient à arbitrer entre chômage et inégalités de salaires et de revenus. Il n’est pas certain que la mise en œuvre d’une réforme s’en trouve facilitée.

 

 

 

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