Quelle route pour l'automobile régionale ?

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45 000 emplois au compteur il y a cinq ans. 38 000 aujourd'hui. Combien demain ?
La filière automobile semblait aller son chemin depuis de nombreuses années. Implantées volontairement par l'Etat dans le sillage de la conversion post-mines, les premières grandes unités industrielles – Française de mécanique, Chausson devenue MCA Maubeuge, STA Ruitz, Renault Douai... – ont généré avec leurs équipementiers, sous-traitants et fournisseurs un des secteurs économiques phares de la région. Il représente à lui seul le tiers de notre emploi industriel. La région pèse lourd puisqu'elle revendique le deuxième rang automobile national et le troisième rang des régions européennes.

Pendant plusieurs décennies, le secteur a su amortir bon an mal an le choc des véhicules en fin de cycle avec l'arrivée de nouveaux modèles ou celle d'un nouveau constructeur, Toyota à Onnaing. Aujourd'hui, le sentiment est celui d'un changement d'époque plus qu'une simple variation de niveau. Vive la voiture électrique, les petits modèles urbains, les nouvelles mobilités de type autopartage ou covoiturage, la voiture individuelle connaissant en revanche un boum historique dans les nouvelles économies où s'opèrent les implantations industrielles (lire plus bas) alors que nos pays connaissent une réduction de voilure. Avec en perspective de grosses interrogations sur le devenir de l'usine Sevelnord, filiale à parité de PSA et Fiat, mais dont l'Italien a annoncé son départ en 2017.

Autre enjeu de taille : la pyramide des âges de nos entreprises grimpe. Plus du quart des salariés de l'automobile en région a plus de 55 ans, ce qui supposera des embauches massives les prochaines années, et donc une meilleure attractivité indispensable des métiers industriels.

Autant de défis qui valaient bien la création d'un "pôle automobile régional" depuis juillet, alors que le secteur pourtant stratégique n'était concerné que de loin par un seul pôle de compétitivité jusqu'à présent, i-Trans (transports innovants). Des défis qui valaient aussi une séance commune au conseil régional et au CESER en septembre, en présence des directeurs industriels du groupe PSA et Renault.

La moitié de la production française de Renault

" Nous voulons continuer à avoir en France une base industrielle performante et vivante. Dans le Nord Pas de Calais, nous comptons 9000 emplois directs, 12000 en incluant Gefco, Faurecia et notre réseau ", souligne Denis Martin, pour PSA, rappelant que ses unités achètent chaque année pour 800 M€ dans notre région. Mieux, PSA a annoncé son projet de renforcer sa R & D en région, l'une des faiblesses principales de la filière. 110 ingénieurs seront ainsi implantés à PSA Valenciennes, pour développer les nouvelles générations de boîtes de vitesse qui mobilisent un investissement de 220 M€ et 400 créations de postes. Le constructeur est engagé dans un gros programme d'investissements de 135 M€ à la FM (JV avec Renault) pour lancer un moteur 3 cylindres turbo. Le poids de Renault est encore plus important en région en terme de volume d'achats annuels, soit 1,1 milliard d'euros. La marque au losange produit en Nord-Pas-de-Calais la moitié des ses véhicules assemblés en France, avec 9000 salariés dont 8000 en CDI. Et les projets y sont nombreux : le Kangoo électrique, bien sûr, mais aussi la réalisation d'un véhicule pour Daimler dans la même usine de Feignies; Douai fait également l'objet d'un programme d'investissement élevé, pour y fabriquer la gamme moyenne et le haut de gamme, sur une plateforme commune avec Nissan. En projet : la production des remplaçantes des Laguna et Espace notamment. STA Ruitz travaille sur la boîte de vitesse automatique pour les 4 x 4 tandis qu'à la FM, des investissements sont en cours pour l'usinage d'une nouvelle culasse.
" La croissance de Renault sera mondiale et nous avons à coeur que la France et la région Nord-Pas-de-Calais en bénéficient ", souligne Gérard Leclercq, directeur industriel de Renault.

Les nouvelles sont par ailleurs positives du côté de Toyota, qui prépare une troisième équipe de 800 personnes en janvier pour assumer le lancement de sa Yaris 3 (et sa version hybride en 2012). Ce véhicule qui vient redynamiser un modèle en fin de cycle (164.000 véhicules produits en 2010 contre un record de 267.000 en 2007) apporte aussi dans son sillage d'autres conséquences heureuses, comme un investissement de 30 M€ chez Toyotomi, qui transforme ce fabricant de pièces de rechange pour les concessions Toyota en équipementier de rang 1 pour des pièces de structure de la Yaris 3. Le projet, qui va s'accompagner de la création de 120 emplois, a été décroché face à la concurrence de la Turquie. " Plus que jamais Toyota veut travailler avec les équipementiers sur les innovations qu'ils peuvent apporter ", relève François Papin, vice président de Toyota Onnaing (TMMF), qui souligne l'importance de " maintenir le niveau des équipementiers en région car c'est eux qui permettent de maintenir la production ici ". Un enjeu d'autant plus aigu que la stratégie du Japonais consiste à régionaliser son organisation, ce qui devrait à terme bénéficier à la seule usine française du constructeur.

L'hypothèque Sevel

Reste une inquiétude majeure : quid de l'avenir de l'usine de monospaces et de gros utilitaires Sevelnord? La JV entre Fiat et PSA, à Lieu Saint Amand, est confrontée au retrait de l'Italien en 2017. Une échéance apparemment lointaine, mais la longueur des cycles automobiles justifie une prise en compte immédiate du sujet. Or le marché du gros utilitaire en Europe n'est pas assez important pour permettre une usine de la taille de Sevel pour un seul constructeur. " Le retrait de ce partenaire pour nous complique considérablement l'accès au marché. Nous vous dirons exactement les scénarios sur lesquels nous travaillons de manière à trouver la rentabilité au projet ", assure Denis Martin, pour PSA. D'ores et déjà, le groupe au lion entend préparer les évolutions du site avec les partenaires pour préparer la gestion prévisionnelle des effectifs. L'ensemble de la filière retient son souffle.

 

38 000 salariés
(- 5 000 emplois entre 2007 et 2008)
33% des emplois industriels de la région
7 sites constructeurs
350 sous-traitants
15 milliards d'euros de CA (-17% en 2008)
(Source : Insee 2010)

 

Une filière trop discrète
Malgré nos demandes répétées, nous n'avons pu obtenir d'entretien avec l'actuel double président de l'Aria et du pôle régional automobile, Frédéric Przybylski, dirigeant de l'usine PSA de Valenciennes. Depuis l'époque où Yann Vincent, ancien directeur de l'usine Renault de Douai, portait haut le verbe de l'industrie automobile, voilà plusieurs années que l'Aria ne s'exprime que par ses équipes opérationnelles, qui le font au demeurant avec beaucoup de professionnalisme et de bonne volonté. Mais il est clair que le discours de ce secteur économique majeur de la région aurait bien plus de force s'il était porté par son représentant officiel. O.D.

Implantations à l'est, fermetures à l'ouest

Les implantations récentes en Europe
Toyota : Onnaing France (2001)
DCX : Ludwigsfelde RFA (2001)
VW Dresde, RFA (2001)
Porsche, Leipzig, RFA (2002)
BMW Leipzig, RFA (2005)
Toyota-Psa Kolin, Tchéquie (2005)
PSA Trnava, Slovaquie (2006)
Kia, Zilinia, Slovaquie (2007)
Hyundai, Ostrava, Tchéquie (2008)
Les dernières grandes fermetures
GM Luton et Ford Dagenham (UK, 2002), Fiat Rivalta (Italie, 2001), MG Rover, Longbridge (UK, 2005), Matra Romorantin (France, 2003), PSA Ryton (UK, 2007), GM Azambuja (Portugal, 2007)

Asparance : un programme pour muscler les équipementiers

Depuis 2008, l'Association régionale de l'industrie automobile (ARIA) pilote une action collective originale, Asparance. 60 entreprises de la région ont profité ou bénéficient encore du dispositif, certaines dans plusieurs des cinq programmes proposés, et qui globalement visent à améliorer la compétitivité des équipementiers, ou les aider à se diversifier, à l'exemple de Delzen (Douvrin). 30 sociétés ont fait l'objet d'un diagnostic complet par le cabinet KPMG. 30 Pme ont participé au programme " Lean manufacturing " (optimiser les ressources industrielles en période de crise), 17 ont suivi l'axe commercial, 30 le programme RH, 13 le volet gestion des équipes, enfin, 24 ont concerné le management participatif pour dirigeants. Le budget 2008-2011 est de 920.000 €, financé par l'Aria, l'Etat (Direccte), le conseil régional et l'Europe.

 

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