Advitam : céréales qui rient et diversification qui pleure

Armel Lesaffre (à g), président d'Uneal et d'Advitam et Jean-Philippe Kerr, son nouveau directeur général Armel Lesaffre (à g), président d'Uneal et d'Advitam et Jean-Philippe Kerr, son nouveau directeur général

Curieux exercice 2021-22 pour le groupe coopératif Advitam. L'activité céréalière, malgré des rendements moyens, a porté les résultats de la maison-mère Uneal, mais les activités de diversification ont plus souffert. Avec au final une perte nette de 3,5 M€.

« Les résultats du groupe ne sont pas à la hauteur de nos attentes. L'objectif est de restaurer la performance grâce à des gains de productivité et par la sobriété ». Armel Lesaffre, agriculteur et président de la coopérative Uneal et de sa filiale Advitam, ne pratique pas la langue de bois. Le groupe coopératif, fort de 6 000 adhérents et de 2 800 salariés, 2e employeur du Pas-de-Calais, a certes vu son activité céréalière croître fortement, à 663 M€ (+ 21% par rapport à l'exercice 2020-2021) pour Uneal, et à 1,7 milliard d'euros (+20%) pour l'ensemble Advitam. En revanche, la rentabilité du groupe basé à Saint-Laurent Blangy, près d'Arras, a fortement chuté, aboutissant à une perte nette de 3,5 M€, contre un gain de 5 M€ un an plus tôt. Et les perspectives ne sont pas fameuses. Hausse des charges, notamment sur les engrais ou l'alimentation animale, envolée des besoins de trésorerie et donc pression sur les frais financiers ont affecté les équilibres. La facture énergétique qui atteignait 4 M€ en 2021-22 va monter à 10 M€ cette année puis 14 M€ l'exercice suivant. « J'ai 33 ans de maison. Je n'ai jamais vu ça ni dans l'amplitude ni dans la soudaineté », décrit Jean-Philippe Kerr, adoubé directeur général du groupe il y a quelques semaines pour redresser la situation. Même si la récolte de la campagne 2021 n'a pas été optimale (82 quintaux/ha par rapport à une moyenne décennale de 86-87 quintaux), un travail fin de tri et de valorisation (par séchage notamment) a permis de sauver l'essentiel et de profiter des cours mondiaux. Heureusement la campagne 2022 a été bien meilleure tant en rendement (96 quintaux/ha) qu'en volume (1,2 million de tonnes).

Effet pouvoir d'achat

Les difficultés du groupe viennent plutôt de certaines activités de diversification logées chez Advitam. Le groupe a plusieurs métiers, le négoce, le machinisme agricole, la distribution (Gamm Vert, notamment), et l'alimentaire (Prise Direct'). Le négoce (438 M€) a bien performé, porté par la dynamique céréalière, et poursuit l'élargissement vers de nouvelles cultures dont la vigne. Le machinisme agricole a bien tenu, à 189 M€ de ventes, mais entravé par des problèmes d'approvisionnement. EN revanche la distribution (273 M€) a vu tant la fréquentation que le panier moyen baisser, après le boom du confinement. L'alimentaire (58,6 M€) est le secteur le plus en difficulté, avec là aussi un recul du panier moyen et un effet pouvoir d'achat très perceptible. Quatre premiers magasins Prise Direct' ont du reste fermé (Valenciennes, Englos, Vendin-le-Viel et La Madeleine). L'autre activité alimentaire, Charlet, reprise il y a quelques années, a vu l'activité remonter mais toujours en perte, pénalisée par les difficultés de la restauration hors domicile.

Pour 2023, la feuille de route de Jean-Philippe Kerr est donc de rétablir la situation à une échéance de « 12-24 mois, pour retrouver une performance qui doit être celle d'un groupe comme Advitam ». « On expertise l'ensemble de nos pôles d'activité pour regagner en compétence », explique le directeur général. D'autant que les tendances de fond entre inflation, coût de l'énergie et hausse des taux devraient encore durer.

Plan de sobriété

Des premières décisions ont été prises pour améliorer les comptes, comme la hausse de 5% de la marge d'intermédiation sur les céréales , mais aussi la demande aux agriculteurs d'avancer 500 euros par tonne à la commande d'engrais, pour limiter l'envolée du BFR.

Advitam a aussi lancé un grand plan de sobriété, depuis la réduction de température dans ses jardineries jusqu'à l'inventaire des moteurs électriques des silos, pour les modifier le cas échéant vers des dispositifs plus économes. « Notre premier métier maintenant, c'est la gestion du risque », analyse Jean-Philippe Kerr, qui maintient en parallèle les réflexions de long terme pour développer par exemple de nouvelles filières (tournesol, sorgho, soja...) « On regarde. La coopérative fait des essais, il faut accompagner plus fort. Il faut un intérêt économique pour l'agriculteur », dit-il.