Inaptitude : une dispense de recherche de reclassement à apprécier avec prudence

"Les médecins du travail n’utilisent pas toujours le formulaire dédié et la rédaction employée ne reprend pas toujours à la lettre l’article L. 1226-2-1 du Code du travail".

Publié le 03/03/2025 par Capstan Avocats / Lecture libre / Temps estimé: 2 minutes

Bruno Platel, avocat associé Capstan Avocats
Bruno Platel, avocat associé Capstan Avocats

L’inaptitude du salarié emporte l’obligation pour l’entreprise de rechercher un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient, en tenant compte notamment des préconisations du médecin du travail et de l’avis du CSE.

Par exception, l’article L. 1226-2-1 du Code du travail dispose expressément que l’employeur est libéré de son obligation de reclassement lorsque l’avis d’inaptitude du médecin du travail mentionne «que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi».
En pratique, les médecins du travail n’utilisent pas toujours le formulaire dédié et la rédaction employée ne reprend pas toujours à la lettre le texte précité.

Les cas de dispense sont d’interprétation strictes et il est régulièrement jugé que l’obligation de reclassement s’impose même si le médecin du travail constate «l’inaptitude du salarié à tout emploi dans l’entreprise» ou encore lorsque l’avis du médecin mentionne que «toutmaintiendu salariédans un emploi dans cette entrepriseserait gravement préjudiciable à sa santé».
Les conséquences sont lourdes pour l’entreprise, le licenciement étant alors automatiquement considéré comme sans cause réelle et sérieuse en l’absence de recherche de reclassement et de consultation du CSE.

Une décision du 12 février 2025 de la Cour de Cassation vient de statuer de nouveau dans un cas où le médecin du travail avait rédigé un avis sans reprendre au mot près la rédaction de l’article L1226-2-1 du Code du travail.
L’avis du médecin mentionnait: 
« Inaptitude à la reprise du poste occupé. L’état de santé du salarié ne permet pas de faire des propositions de reclassement au sein de l’entreprise filiale et holding compris et le rend inapte à tout poste».

L’employeur n’ayant pas procédé à une recherche de reclassement, le salarié inapte contestait son licenciement, motif pris que la formule utilisée par le médecin du travail ne reprend pas la mention de l’article L. 1226-2-1 du Code du travail.

La Cour de cassation a ici approuvé les juges du fond considérant la formule utilisée par le médecin du travail comme étant équivalente à la mention de l’article L. 1226-2-1 du Code du travail.
Analyse faite de l’arrêt, les juges ont prêté une attention particulière à la clarté de l’avis d’inaptitude et à l’équivalence des situations, se rapportant expressément à la mention légale.
Le chef d’entreprise restera prudent dans la lecture de l’avis d’inaptitude du médecin du travail avant de déterminer s’il peut s’estimer être dispensé de recherche de reclassement.