Mécènes Forum : « L'avenir du mécénat est dans les territoires»

A l'occasion du Mécènes Forum, événement national organisé les 2 et 3 octobre à la Cité des Echanges par Admical, son délégué général Yann Queinnec défend ce mode d'engagement sociétal dont Bercy voudrait réviser le régime fiscal. Interview.

Publié le 29/09/2025 par Olivier Ducuing / Lecture libre / Temps estimé: 3 minutes

Votre association tient son forum biennal cette année dans le Nord. Quel est le message principal?

Oui, il y a deux ans c'était à Lyon. Cette année à la Cité des Echanges, avec 500 personnes attendues. C'est dans les territoires désormais que nous tenons cet événement national. Car l'avenir du mécénat est dans les territoires. En fond d'écran, on voit bien que rien ne va au niveau national, mais qu'au niveau territorial, le trio entreprises-associations-collectivité permet de bien fonctionner notamment pour le mécénat.

Certes, mais si l'Etat envisage de modifier votre cadre réglementaire, ce qui est le cas, même le niveau local risque de souffrir...

Au début de l'été, il y a eu des discussions sur la loi de finances 2026 et une levée de boucliers suite à un rapport de l'inspection générale des finances qui visait à remettre en cause complètement le régime du mécénat*. On a réussi à les convaincre de ne pas y toucher. Le message, c'est: faites nous confiance, laissez de la stabilité à ce régime, c'est une dépense fiscale efficace!

D'accord, mais l'Etat cherche de l'argent partout. Comment le convaincre durablement que le mécénat rapporte plus au pays qu'il ne coûte?

Tout simplement en prenant en compte les coûts évités par l'Etat, quand par exemple une association œuvre sur le décrochage scolaire, ou quand le maire de Grigny (Essonne) parvient à faire mécéner le sport comme facteur de paix sociale. Bercy ne voit que le prisme du manque à gagner. Il ne faut oublier non plus le solde payé par les entreprises, à savoir 40%.

Que se passerait-il si l'Etat mettait un terme au régime actuel?

Il y aurait un effet létal direct. 20% environ des entreprises ne déclarent pas leurs dons mais 80% le font. Ce sont environ 200 000 entreprises en tout. Il y aurait un effet mécanique évident, lié aussi au paysage des entreprises mécènes. 97% des entreprises mécènes sont des TPE ou des PME, avec des petits montants.

Quelles sont les grandes tendances dans l'univers du mécénat?

Le mécénat est un levier très simple à comprendre et à utiliser au titre de la RSE. C'est donner. Des initiatives encore limitées vont jusqu'à donner une part du capital des entreprises à des fondations actionnaires. Avec les 700 000 entreprises qui doivent changer de mains dans les 10 ans, il y a un sujet. Une autre tendance est celle du mécénat collectif: si une PME toute seule va donner 5 000 euros par an, ça ne va pas changer le «game» sur le territoire. A plusieurs, c'est différent. J'ai le cas d'un groupement d'entreprises monté avec le CJD de la Vienne, ça a commencé à 8, ils sont 60 avec un réel impact. Il y a encore le mécénat de compétences, qui ne concerne que 16% des entreprises mécènes, avec un vrai potentiel de développement.

Plus largement, seules 9% des entreprises françaises font du mécénat. Il faut que ça devienne un réflexe naturel pour un chef d'entreprise. On n'y est pas encore. Mais si le mécénat est désintéressé, il y a néanmoins des bénéfices collatéraux, depuis la marque employeur jusqu'à la performance extra-financière, à la valorisation du goodwill ou encore demain pour gagner des points dans les appels d'offres privés comme publics.

*Les entreprises peuvent défiscaliser 60% de leurs dépenses de mécénat pour les versements inférieurs à 2 M€.