Réduction de capital et report d'imposition : deux modalités, deux solutions opposées

"L’administration fiscale a privilégié l’application de « la lettre de la loi » à la réalité économique de l’opération."

Publié le 29/11/2023 par Equipe Eco121 / Lecture libre / Temps estimé: 2 minutes

Jérôme Granotier, avocat associé Bignon Lebray
Jérôme Granotier, avocat associé Bignon Lebray

L’apport de titres par une personne physique à une société qu’elle contrôle et soumise à l’impôt sur les sociétés est une opération très courante. Elle permet notamment à un créateur d’entreprise de transférer les titres de sa société sous une société holding personnelle. Sur le plan fiscal, cette opération ne génère aucun coût immédiat puisque la plus-value d’apport est placée, de plein droit, en report d’imposition (art. 150-0 B ter du Code général des impôts).

La plus-value d’apport devient imposable lors de la cession à titre onéreux, du rachat, du remboursement ou de l’annulation des titres reçus en rémunération de l’apport.

S’est alors posée la question du maintien du report d’imposition en cas de réduction de capital motivée par des pertes. En effet, l’imputation des pertes sur le capital peut s’effectuersoit par une diminutiondu nominal des titres,soit par une annulationdes titres.

L’administration fiscales’est prononcée dans cesdeux cas de figure.Initialement, dans unrescrit publié (BOI-RESRPPM-000115), elle aadmis que la réductionde capital par réductiondu nominal des titrespar apurement despertes antérieures neremet pas en cause lereport d’imposition dela plus-value d’apport.

En effet, l’opération neconduit à aucun remboursement aux associés.Plus récemment, dans une réponse ministérielle Woerth (JOAN 29 août 2023 p 7749), l’administration a considéré que la réduction de capital par annulation des titres reçus en rémunération de l’apport mettait fin au report d’imposition. Cette position est critiquable car, de manière similaire à la réduction du nominal, les associés ne bénéficient d’aucun remboursement lors de l’annulation de leurs titres.

L’administration fiscale a privilégié l’application de « la lettre de la loi » à la réalité économique de l’opération. Cette position est dommageable car les associés concernés verront tomber leur report d’imposition sur leur plus-value d’apport sans être toutefois en mesure, dans la plupart des cas, d’imputer la moins-value d’annulation des titres ; cette imputation étant soumise à des conditions très restrictives. Ils seront donc redevables d’un impôt sur la plus-value sans avoir perçu aucune disponibilité pour l’acquitter.