Conjoncture : nos dirigeants ont le moral en berne

La dernière enquête de conjoncture commune à la CCI et la chambre des métiers laisse apparaître une nette dégradation du climat économique au premier trimestre 2023. Avec des inquiétudes plus particulières pour certains secteurs comme la restauration ou le bâtiment.

Les réseaux consulaires de la CCI et de la Chambre des métiers se sont conjugués pour produire une large enquête de conjoncture portant sur le premier trimestre 2023. Résultat : entre un chiffre d'affaires en recul, une trésorerie qui se tend, les coûts de l'énergie et des matières premières qui s'envolent, le moral n'est pas au beau fixe.

Côté CCI, les chefs d'entreprise font état d'un recul important de l'activité. 41% d'entre eux déclarent une baisse de chiffre d'affaires au T1, en moyenne de 25%. Pour plus du tiers (36%), leur trésorerie est mauvaise, un ratio qui monte à 47% dans les CHR et 44% dans le commerce de détail.

11% déclarent une baisse des effectifs, contre 7% qui ont embauché. En parallèle, le nombre de défaillances connaît une progression très rapide pour atteindre 1045 dossiers au premier trimestre, un plus haut depuis 2017. Et leur nombre a plus que doublé en un an dans l'hôtellerie-restauration (+125%).

Côté artisanat (soit 120 000 professionnels), la détérioration continue. Seuls 4% se déclarent un suractivité, contre 56% dans le cas inverse. Les chiffres d'affaires déclinent pour 55% des artisans, dont une baisse de plus de 30% pour 14% d'entre eux. La situation se dégrade tout spécialement dans le domaine de la construction où 55% dirigeants (+ 19% sur un trimestre) notent un recul au T1. « Le ralentissement général se rapproche de la période Covid », analyse même Emilie Defer, responsable des études à la chambre des métiers.

La proportion d'artisans confrontés à des difficultés de trésorerie bat des records (64%, mais jusqu'à 78% dans l'alimentaire), du fait de trois facteurs principaux : la hausse des matières premières et de l'énergie, le ralentissement d'activité et l'accroissement des charges. La proportion d'artisans annonçant avoir baissé leurs effectifs au premier trimestre connaît un pic depuis 2019, tout spécialement, là encore, dans l'alimentaire (25%), la production (18%) et les services (18%).

 

23% des dirigeants inquiets sur la pérennité de leur entreprise

Côté finances, on relèvera aussi que 33% des entreprises et 36% des artisans éprouvent des difficultés à rembourser leur PGE. Une part non négligeable des prêts souscrits depuis un an le sont non pas pour investir mais pour couvrir un besoin de trésorerie (27%).

Ces indicateurs négatifs retentissent sur l'état d'esprit des dirigeants. 23% d'entre eux sont inquiets sur la pérennité de leur entreprise côté CCI, 19% côté CMA.

« Ce qui m'inquiète est que ce blues du chef d'entreprise, par nature résilient, est devenu une grande fatigue », relève Philippe Hourdain, président de la CCI de région, qui souligne en parallèle une progression importante (+15%) du nombre d'entreprises à vendre. « Je suis préoccupé comme jamais je ne l'ai été », raconte de son côté Laurent Rigaud, président de la CMA. « Les entreprises artisanales ne vont pas pouvoir continuer à ne plus être rentables ». L'élu consulaire stigmatise tout particulièrement les énergéticiens, dont les « factures toxiques » assurent leurs bénéfices tout en plaçant des artisans normalement rentables dans la misère. « Il faut sauver l'artisanat », déclare-t-il fortement.