La conciliation, outil d’anticipation de la fin du “quoi qu’il en coûte”

"La durée d’une procédure de conciliation peut être portée à 10 mois, le double du droit commun” "La durée d’une procédure de conciliation peut être portée à 10 mois, le double du droit commun”

Philippe Larivière, avocat associé Bignon Lebray

 Il y a un an, nous consacrions cette tribune à l’ordonnance n°2020-341 du 27 mars 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises à l’urgence sanitaire, gageant que les mesures gouvernementales permettraient de limiter les défaillances d’entreprises.

Ce premier objectif semble atteint puisque, contrairement aux craintes, le nombre de procédures collectives ouvertes en France en 2020 aurait baissé de près de 40% par rapport à 2019, soit environ 20 000 entreprises. Ce bilan en trompe-l’œil est certainement révélateur d’une économie sous perfusion : chômage partiel, prêts garantis par l’Etat (PGE), exonérations de charges, fonds de solidarité.

On prédit donc aujourd’hui des faillites à répétition en 2021, mais le "quoi qu’il en coûte" présidentiel est-il réellement révolu ?

L’annonce récente de la possibilité offerte aux entreprises qui le souhaitent, quelles que soient leur activité et leur taille, de différer d’un an supplémentaire le remboursement de leur PGE, permet d’en douter. D’autres mesures vont dans le même sens.

Ainsi, l’article 124 de la loi n°2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique a prorogé jusqu’au 31 décembre 2021 les mesures de protection offertes aux entreprises en difficulté, à l’exclusion de celle - très controversée - facilitant la reprise d’une entreprise en faillite par ses propres dirigeants. Autre mesure importante, celle issue de l’ordonnance n°2020-1443 du 25 novembre 2020, qui adapte à nouveau les règles relatives aux difficultés des entreprises aux conséquences de la pandémie, dont l’article 1er permet de porter la durée d’une procédure de conciliation à dix mois, le double du droit commun.

Cette mesure s’applique aussi jusqu’au 31 décembre 2021, l’objectif énoncé dans le rapport au Président de la République étant de ne pas compromettre les efforts de recherche d'une solution préventive dans un contexte de persistance de la crise sanitaire rendant les prévisions difficiles. Sa totale confidentialité, son caractère préventif et les passerelles ouvertes avec les procédures semi-collectives de sauvegarde et de pré-pack cession, ainsi que les pouvoirs accrus confiés au président du tribunal pour mettre au pas les créanciers récalcitrants, font de la procédure de conciliation un outil majeur de gestion des difficultés financières. Reste aux chefs d’entreprise à savoir s’en saisir et à anticiper les réelles difficultés : l’absence de cessation des paiements depuis plus de 45 jours demeurant requis pour pouvoir bénéficier d’une telle procédure.