Dans les coulisses de Saverglass

Crédit photos Teddy Hénin Crédit photos Teddy Hénin

Comme chaque mois, Eco121 vous propose de découvrir en photos, les pépites de l'industrie régionale. Dans le numéro 97, zoom sur l'une des plus précieuses d'entre elles : Saverglass, le spécialiste du flaconnage premium et super premium.

"Nous partîmes 500 et par un prompt renfort, nous nous vîmes 3 000 en arrivant au port". La célèbre tirade de Don Rodrigue résume parfaitement l'aventure vécue par le verrier Saverglass, né en 1987 à Feuquières (Oise), au cours des trente dernières années. Cédée en 1986 par la famille Desjonquères, l'usine est devenue le cœur d'un groupe fort de six unités et de quatre sites de parachèvement qui, ensemble, emploient plus de 3 000 personnes. Profitant de la montée en gamme des spiritueux – un phénomène mondial – le groupe enregistre des taux de croissance de 10% par an. Une progression qui s'explique par son offre différenciante, grâce à ses designs notamment, mais également très qualitative. Pour cela, Saverglass mise sur un outil industriel sans cesse amélioré, comme le confirme le rachat récent du site belge MD Verre, propriété de l'espagnol Vidrala, dont l'usine basée près de Mons va faire l'objet de 50 M€ d'investissement dans les trois prochaines années.

La réussite de Saverglass repose sur une maîtrise d'un process, dont les origines remontent à plus de 3 000 ans. Avec 70% de silice, un sable de très bonne qualité, 15% de soude et 10% de chaux, auxquels s'ajoutent d'autres éléments, l'entreprise produit la base d'un verre de très haute qualité. Une fois mélangés, ces éléments sont acheminés en couches successives sur un tapis convoyeur, qui permet d'y ajouter le calcin, des éléments de production antérieures « recyclés ». Ce nouveau mélange permet de réduire les émissions de CO2 et l'énergie utilisée pour faire fonctionner les fours.

 

Les trémies d'alimentation acheminent le mélange à l'intérieur du four où la température de fusion atteint 1 500°C ! Liquide, le verre est ensuite amené vers les moules via des canaux, baptisés feeders. Ceux-ci jouent un rôle primordial dans le process, en approvisionnant les moules en fonction du débit et de la température adaptée à chaque production.

Le verre en fusion parvient ensuite dans une cuvette pour former des gouttes, appelées « paraisons ». Calibrée, puis coupée, la paraison tombe dans un moule ébaucheur, où l'air sous pression est injecté pour former la bouteille.

Saverglass dispose d'un catalogue de plus de 600 modèles, qui peuvent être personnalisés quasiment à l'infini.

Retournées par un mouvement à 180°, les bouteilles sont envoyées vers le moule finisseur où le verre prend sa forme définitive, tout en se solidifiant. Le fond des flacons est refroidi par de l'air et les bouteilles convoyées vers une arche de recuisson. Cette opération, réalisée à 560°, est nécessaire pour libérer les tensions du verre et lui donner sa solidité. Celle-ci peut durer entre 1h30 et 4 h selon les productions. En sortie de tunnel, la température est de 150°.

Une fois refroidis, les articles font l'objet de contrôles très stricts. 14 points sont vérifiés automatiquement ou visuellement afin d'assurer une qualité optimale de la production. Ils sont ensuite conduits en bout de chaîne pour être palettisés et expédiés. L'usine de Feuquières dispose d'une capacité de 90 000 tonnes/an.

 

 

 

 

 

 

SAVERGLASS EN BREF

Spécialité : Fabrication de bouteilles premium

Position : n°1 mondial

Siège social : Feuquières (Oise)

Chiffre d'affaires : 500 M€

Nombre d’usines : 6

Effectifs : plus de 3 500 collaborateurs

Croissance : 10% par an

Loïc Quentin de Gromard, Pdg de Saverglass :

« 500 M€ auront été investis dans notre outil de production en huit ans » 

Saverglass semble plus que jamais en pleine forme. Est-ce le cas ?

Nous pouvons dire que oui ! Le choix de la spécialisation sur les secteurs premium et super premium, opéré il y a une trentaine d'années, a été un choix stratégique fort, dont nous recueillons aujourd'hui les bénéfices. Ces secteurs représentent, en tonnage, 5% seulement du marché du verre, mais 19% de sa valeur. En outre, ce marché se développe 5 fois plus vite que le marché des spiritueux standard. Nous accompagnons ce phénomène de « premiumisation », c'est-à-dire de montée en gamme, partout dans le monde, car celui-ci est devenu global.

Ce phénomène concerne l'ensemble des spiritueux ?

Oui, à des niveaux variables selon les années et les zones géographiques, bien entendu. En Chine, par exemple, après la parenthèse des mesures prises il y a quelques années pour lutter contre la corruption, le marché du cognac a connu, de 2015 à 2018, une croissance très soutenue. Ce produit symbole de la France en Asie, reste très demandé, y compris par des classes moyennes locales dont le pouvoir d'achat a augmenté. Dans la zone Amérique, la tequila enregistre une croissance à deux chiffres qui ne faiblit pas. Notre usine mexicaine, inaugurée il y a un an, est déjà saturée notamment grâce à nos produits haut de gamme. La force de Saverglass est en effet de pouvoir proposer des produits en petite série, à partir de 30 000 unités, très qualitatifs et personnalisables. Nos collections s'enrichissent de 15 et 20 nouvelles formes par an, ce qui permet à nos clients, en ayant recours à la personnalisation par le décor, d'avoir une offre différenciante, qui n'existait pas jusqu'à présent aux Etats-Unis et au Mexique. Nous comptons aujourd'hui quelque 600 produits en catalogue, dont les design sont déposés.

Cette tendance concerne t-elle aussi le vin ?

En effet, de plus en plus. Il n'y a qu'a regarder ce qui se passe actuellement dans les secteurs du vin rosé ou du champagne... Les habitudes évoluent, notamment parce que, ailleurs dans le monde, les habitudes et les modes de consommation ne sont pas les mêmes. Cette augmentation générale a entraîné une croissance annuelle de 10% pour notre groupe au cours des deux dernières décennies. Soit une nécessaire augmentation moyenne de capacité de 20 000 tonnes supplémentaires chaque année ! Face à cette situation, nous avons pris deux décisions : agrandir notre usine de Arques, dont les capacités vont augmenter de 20% pour avoisiner 400 tonnes jour ; acquérir l'usine MD Verre, située à Ghlin, près de Mons (Belgique). Avec 250 collaborateurs, celle-ci exploite deux fours et produit 155 000 tonnes de verre par an.

Cette acquisition va t-elle s'accompagner d'investissements ?

Oui, nous allons investir 50 M€ en deux ans dans cette unité pour la porter aux standards de qualité de Saverglass. Ainsi, le marché des vins pourra être approvisionné à partir, à la fois, de la France, de la Belgique, du Mexique, et de notre usine des Emirats, bien placée pour fournir les Etats-Unis, mais aussi l'Australie ou la Nouvelle-Zélande. Les autres sites, comme le Havre, Arques ou Feuquières pourront profiter du transfert d'une partie de ces productions pour se spécialiser davantage encore dans les spiritueux de luxe. Leurs outils sont en effet mieux appropriés à ce type de fabrication. Ainsi, au total, quelque 500 M€ auront été investis dans notre outil de production en huit ans. C'est le passage obligé pour rester le leader mondial sur notre segment de marche.

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