ACC ouvre le bal des nouvelles méga-usines de batteries

Inauguration en grande pompe ce mardi 30 mai de la première usine géante de batteries en France, ACC. Avec un soutien public considérable et assumé. Le défi est désormais celui de la performance pour être compétitif demain face à la concurrence asiatique.

Patrick Pouyanné, patron de TotalEnergies, Carlos Tavarès, son homologue de Stellantis, et Ola Källenius, le dirigeant de Mercedes-Bens : les trois capitaines d'industrie, tous co-actionnaires dans cette aventure de l'électrique, ont marqué de leur présence le 30 mai l'inauguration formelle de l'usine ACC de Douvrin. Autrement dit, la toute première «gigafactory » de batteries de l'Hexagone. Plusieurs ministres français, allemand et italien avaient aussi fait le déplacement pour porter sur les fonts baptismaux cette première très grande implantation automobile en région depuis Toyota à Onnaing en 1998, pour un investissement prévu de quelque 2 milliards d'euros.

A quelques encablures de la Française de Mécanique, fabricant de moteurs thermiques voué à disparaître, Automotive Cells Co rentre désormais dans une phase de tests avant une montée en puissance progressive sur la première ligne de production qui la conduira à être à pleine charge fin 2024. L'usine disposera alors d'une capacité de plus de 13 GWh, qui sera portée à 40 GWh à l'horizon 2030. Le site emploiera alors quelque 2 000 salariés, contre un peu moins de 300 aujourd'hui.

Bruno Le Maire, le ministre allemand du numérique ainsi que le ministre italien des entreprises Adolpho Urso ont abondamment vanté la politique industrielle européenne qui a permis cette réalisation, au prix de subventions massives mais assumées. « Aujourd'hui est un grand jour pour l'industrie (…). Pour la première fois depuis Airbus, la France et l'Europe créent une nouvelle filière industrielle. (…) Pour que cette usine naisse, il a fallu que les Etats français et allemand mettent la main à la poche (1,2 milliard sur les différentes unités d'ACC dont 800 M€ à Douvrin, ndlr). Pour une fois, les politiques ont fait du bon boulot », s'est réjoui le ministre français de l'économie et des finances.

 

"Prendre le virage avant les autres"

Xavier Bertrand n'a pas dit le contraire, saluant même l'action du gouvernement, mais revendiquant aussi la réactivité des collectivités, qui ont permis d'accdélérer le dossier et qui apportent 121 M€ dans l'escarcelle. « Nous avions conscience que l'avenir de l'industrie automobile passerait par le véhicule électrique et la batterie. Il était essentiel de prendre ce virage et de le prendre avant les autres ».

Pour autant, le défi reste devant les promoteurs de cette première usine et des autres qui se sont accélérées ces derniers mois : Envision, Verkor, ProLogium. «Nous sommes convaincus d'être vraiment sur un projet extraordinaire pour la France, l'Allemagne, l'Europe. Il y a une nécessité d'atteindre le niveau de performance le plus élevé possible. C'est un extraordinaire mais difficile projet », a commenté Yann Vincent dirigeant d'ACC, vivement salué par Carlos Tavares pour la maîtrise avec laquelle il a mené à bien cette construction dans des délais si serrés.

Le train de la batterie électrique est donc lancé à grande vitesse, mais avec encore des questions nombreuses. « C'est un vrai pari que de créer une filière de batterie en Europe, on fait face à de vrais concurrents venant de l'Est », a averti Patrick Pouyanné, Pdg de TotalEnergies. « Ici la batterie produira 40% de CO2 en moins que celle fabriquée en Asie, il faudra capitaliser sur cet avantage ».

La batterie nordiste devra aussi  être compétitive pour réussir son pari. « Il faudra mettre en concurrence les différentes chimies pour que la meilleure s'impose sur le marché », estime Carlos Tavares, qui mise aussi sur la recherche de nouvelles matières premières qui éviteront des surcouts et des dépendances. « Plus tôt on démarre, plus tôt on rencontrera des difficultés et plus tôt on surmontera ces difficultés », a-t-il lâché. Le patron de Stellantis en a aussi clairement appelé à protéger l'industrie automobile européenne pendant cette période transitoire où l'automobile européenne rattrape son retard, dès lors que c'est « la réglementation européenne qui nous a positionné sur le point de force principal de nos concurrents asiatiques »

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