Les déchets de la métropole pour chauffer 35 000 logements

La métropole lilloise s'est doté d'une boucle de chaleur produite par son incinérateur de déchets d'Halluin. Un réseau parmi les plus longs d'Europe, qui apporte une énergie verte et décorrélée des cours mondiaux à 35 000 logements.  Le ruban a été coupé le 29 novembre. 

 

Pour le symbole, c'étiat parfait : le brouillard froid et compact était bien au rendez-vous pour l'inauguration formelle de l'autoroute de la chaleur de la métropole à Halluin, le 29 novembre. une manifestation qui aura attendu deux ans, pour cause de Covid et autres difficultés d'agenda. C'est une installation exemplaire qu'ont donc formellement lancée Damien Castelain, président de la MEL, Jean-François Nogrette, directeur général de Veolia France, et Sylvie Jehanno, pdg de Dalkia. "Vous avez ici une illustration incroyable de ce qu'il est possible de faire dans les huit ans (l'échéance 2030 de réduction de 55% des gaz à effets de serre, ndlr)", s'est exclamé Hervé Pignon, directeur régional de l'Adème. 

De quoi s'agit-il ? Ce Centre de valorisation énergétique (CVE) d'Halluin, nom plus flatteur pour un incinérateur, exploité par Covalys (filiale de Véolia) brûle annuellement 350 000 tonnes de déchets de la métropole, qui étaient partiellement transformés en électricité. Désormais ils sont convertis aussi en vapeur, qui alimente une boucle de 20 kilomètres de tuyaux implantée sur le territoire de 10 communes parmi lesquelles Lille, Roubaix ou Mons-en-Barœul. Elle permet de chauffer quelque 35 000 logements sur son tracé. "C'est un des plus longs réseaux en Europe, il aura fallu 26 mois de chantier", s'est félicité Jean-François Nogrette, évoquant non pas une transition mais bien une transformation écologique, permettant d'exploiter une ressource locale disséminée mais à portée de main. L'autoroute de chaleur n'est pas qu'un circuit de tuyaux, c'est aussi un smart grid, un réseau intelligent et "connecté de partout", expose Sylvie Jehanno. "Nous sommes les grands experts de la chasse au CO2", a lancé fièrement la dirigeante.  

 

Exit la centrale à charbon

La mise en service de l'équipement permet aussi à la MEL de se débarrasser de la dernière centrale à charbon du territoire (Mont de Terre), et d'économiser 50 000 toinnes de CO2. Le projet, qui a mobilisé plus de 70 M€, a bénéficié de 25 M€ d'aides publiques (Adème, Feder via la Région). Outre son bilan carbone, et sa dimension de souveraineté énergétique, l'autoroute de la chaleur présente un autre avantage pour ses usagers : la chaleur étant produite par de l'énergie verte permet de bénéficier d'une TVA réduite. 

Cette autoroute de la chaleur pourrait n'être qu'une première étape, même si les capacités maximales sont aujourd'hui atteintes. Il faudrait implanter un quatrième four, hypothèse en réflexion, avec notamment les Belges "qui tapent à la porte", révèle Audrey Linkenheld, vice-présidente de la MEL. Des unités complémentaires de biomasse pourraient être envisagées. "On va revoir le réseau de chaleur de la métropole pour aller encore plus loin. Je veux brancher d'autres communes", annonce Damien Castelain, qui entend mettre à profit le renouvellement du marché Résonor (réseau de chaleur Lille et Hellemmes) en 2025, mais aussi les potentialités du territoire métropolitain : des hectares près de l'aéroport, les ombrières, les toitures, tous les délaissés de la SNCF  capables d'accueillir du photovoiltaïque. Mais aussi l'hypothèse d'une unité d'hydrogène à côté du centre de valorisation organique à Sequedin, qui produit du biogaz, et qui pourrait se coupler avec un projet de l'usine chimique PCL de Loos. "On a envie de mettre 10% de bus à l'hydrogène", lâche Damien Castelain.