L'Etat rebat la carte intercommunale

La France aux 36.000 communes, l'empilement des strates territoriales : l'air est connu depuis fort longtemps. Jean-Pierre Chevènement a mis en place en 1999 une grande réforme en créant les intercommunalités. Réforme imparfaite néanmoins, certains périmètres étant artificiels, d'autres dépourvus de la masse critique en terme d'ingénierie pour des projets d'envergure. L'État lance aujourd'hui une deuxième étape pour simplifier le puzzle, dans le droit fil de la loi du 16 décembre 2010. Dans le Nord, la carte proposée par le Préfet n'y va pas par quatre chemins : de 48 intercommunalités aujourd'hui, elle propose de réduire le spectre à 18 ! Une division presque par trois. Le Pas-de-Calais passerait quant à lui de 43 à 23 intercos. Les syndicats intercommunaux sont aussi concernés: ils devraient fondre par exemple de 236 à 96 dans le Nord.

Le schéma de coopération intercommunale, qui doit faire l'objet d'une concertation avec les élus locaux, n'est cependant pas révolutionnaire pour les plus grands ensembles urbains. Pas de grand soir par exemple pour ceux qui pouvaient espérer le regroupement des trois communautés d'agglomération de Lens-Liévin, Artois Comm et Hénin-Carvin. Idem pour Valenciennes Métropole et la Porte du Hainaut, dont le Yalta initial n'est pas remis en question. Une communauté urbaine dans le bassin minier ? " C'aurait été beaucoup trop conflictuel avec les élus communistes. Nous préférons une négociation progressive à une rupture brutale ", relève Guy Delcourt, maire de Lens et vice président de la communaupôle de Lens-Liévin. Christian Poiret, président de la communauté d'agglo du Douaisis, se félicite de son côté d'un changement tout en douceur. "On ne peut pas passer de tout à rien. C'est déjà un beau challenge. La référence, c'est encore la commune, pour les élus. Il faut déjà qu'ils apprennent à avoir l'esprit communautaire ".

Lille Métropole, qui n'était demandeuse d'aucun changement, se verrait rejointe par cinq communes des Weppes. La communauté urbaine de Dunkerque ou l'agglo de Douai ne bougeraient quasiment pas. Seule la communauté d'agglomération Maubeuge Val de Sambre serait nettement renforcée avec l'adjonction de trois communautés de communes, dont celle présidée par le turbulent Joël Wilmotte, maire de Hautmont, particulièrement hostile à cette perspective. La suspicion d'arrière-pensées politiques pèse toujours, ainsi que la réticence habituelle des petites communes, notamment rurales, à être rattachées à de grands ensembles.

Parmi les nouveautés figure la création d'une grande Pévèle, soit 43 communes et 145.000 habitants. De même, la Flandre intérieure serait " débalkanisée ", selon le mot de l'ancien préfet de région Jean-Michel Bérard, passant de 7 à 4 intercos. Toute une procédure est engagée qui doit aboutir à l'adoption définitive du schéma intercommunal pour le 31 décembre. Autant dire demain.