Une région à haut potentiel pour la méthanisation

Produire une énergie renouvelable, limiter les gaz à effet de serre et l’utilisation d’engrais chimiques ? Les Hauts-de-France disposent des ressources pour le faire. Comment ? Grâce à la méthanisation. Ce processus naturel permet de produire du biogaz à partir de déchets organiques (déchets agricoles tel que déjections des animaux d’élevage, résidus de cultures, déchets industriels et ménagers...) pour produire de la chaleur, de l’électricité et faire fonctionner des véhicules.

Les agriculteurs en tirent aussi des avantages. La méthanisation va transformer les déchets organiques d'un côté en biogaz qu’ils vont pouvoir soit utiliser directement soit vendre, de l'autre en résidu valorisable : le digestat. Celui-ci peut en effet être épandu sur les terres agricoles et servir de substitut aux fumiers/lisiers et aux engrais de synthèse. Avec un avantage certain par rapport aux fu- miers et lisiers : il est inodore.

Ces cinq dernières années, la méthanisation en injection dans les réseaux de gaz s’est fortement développée dans les Hauts-de-France (nombre d’unités en injection multi- plié par 7 de fin 2018 à fin 2022). « Il s’agit de l’une des régions les plus dynamiques de France, avec plus de 170 unités de méthanisation en fonctionnement », souligne Cédric Alvéra, ingénieur énergie à l’ADEME (cedric.alvera@ademe.fr).

La filière s’est notamment développée sous l’impulsion du CORBI (Collectif Opérationnel Régional du Biométhane Injecté), créé en 2014, regroupant acteurs industriels et agricoles, associations et institutions. L’an dernier, un manifeste a dévoilé les ambitions à l’horizon 2025. L’objectif est notamment d’injecter au moins 3TWh/an de biométhane dans le réseau de gaz régional, soit l’équivalent de la consommation annuelle de 500 000 logements. De son côté, l’ADEME accompagne la structuration de la filière et contribue à son financement, avec pour priorités la mobilisation des biodéchets locaux, des effluents et des sous-produits agricoles dans une logique d’économie circulaire. « La filière régionale est à la fois mature et prometteuse, avec un potentiel de développement important, note Cédric Alvéra, à condition d’optimiser la mobilisation des ressources de biomasses pertinentes et disponibles.»

Avec l’obligation de traitement à la source des biodéchets des ménages à partir du 1er janvier 2024, la méthanisation apparaît comme l’une des solutions. Cependant, la filière rencontre quelques difficultés ces derniers temps, en raison notamment de la forte augmentation des coûts des matériaux et de l’électricité. Ce qui a entraîné un ralentissement du nombre de projets. Au-delà de la question des coûts, la méthanisation reste encore méconnue, ce qui peut entraîner une certaine méfiance. Il existe pourtant un vrai enjeu d’appropriation par les acteurs du territoire pour se familiariser avec ce procédé vertueux. La région, qui s’est dotée dans le cadre du CORBI d’une charte de concertation et de dialogue territorial autour des projets, prévoit une production de la filière méthanisation de 9 TWh/an d’ici à 2031, soit environ 500 sites. Actuellement, les 170 sites régionaux produisent un peu plus de 2 TWh/an.

L'événement régional métha'morphose pour découvrir la filière biométhane

Pour dynamiser la filière, Métha'Morphose a été lancé il y a huit ans. Cette journée d’échanges et de découvertes, qui se déroule tous les deux ans, réunit l’ensemble des acteurs de la filière des Hauts-de-France. La quatrième édition se déroulera le jeudi 7 décembre prochain à la Chartreuse du Val-Saint-Esprit, à Gosnay. Au programme : ateliers d’échanges, plénières, remise des prix du challenge étudiant, et village de la méthanisation.

https://www.methamorphose.org/fr/

Une nouvelle unité en service à Feignies

L’ADEME a accompagné la construction dans la commune de Feignies d'une unité de méthanisation agricole en injection, co-portée par un collectif d’agriculteurs et la Communauté d’Agglomération de Maubeuge Val de Sambre. L’agence a accordé une aide de plus de 1M€ pour un projet de 12M€. La spécificité technique du projet réside dans la création de deux filières de digestion distinctes, l'une sur les boues de STEP et l'autre sur les effluents agricoles (intégrant une unité d’hygiénisation). Le traitement des déchets organiques par méthanisation, la production d'énergie renouvelable qui en découle, ainsi que la valorisation des engrais organiques permettront d'éviter 6 360 tonnes équivalents CO2 par an. L’unité pourra fournir en biogaz 1 697 équivalent-logements. Le digestat (26 725 tonnes/an) sera valorisé en engrais organique sur des terres agricoles.