Le biofioul, avenir du chauffage au fioul ?
Comment faciliter la transition énergétique en zone rurale sans stigmatiser les particuliers qui se chauffent au fioul ? Les professionnels répondent par l’intégration croissante du colza. Une rencontre sur le sujet se tenait à Lille le 24 septembre.
Depuis 18 mois, la principauté de Monaco dispose d’un chauffage au fioul 100% renouvable, pour les 24 chaudières du palais princier. Ce modèle pourrait-il remplacer nos chaudières au fioul demain ? Les professionnels du fioul qui représentent 1400 distributeurs en France, veulent y croire, au moment où le gouvernement prépare des restrictions sur les chaudières à pétrole fossile. Or les réponses techniques existent, pour éviter aussi à une population rurale pas forcément très à l’aise financièrement de devoir remplacer leur chaudière du jour au lendemain. « On travaille déjà depuis deux ans sur la décarbonation du chauffage au fioul et à l’introduction de colza pour réduire les émissions de CO2 », explique Eric Layly, président de la Fédération française des combustibles, carburants et du chauffage (FF3C), bien conscient de la nécessité de s’orienter vers du chauffage toujours plus propre.
La teneur en soufre du fioul fossile atteint les 1000 ppm, mais la filière prépare des carburants beaucoup plus verts. Le F10 contiendra ainsi 10% d’ester de colza, le F30 en contiendra 30% et devrait également présenter un très faible taux de soufre. Ses émissions de CO2 seraient par ailleurs réduites autour des 230 grammes par kw/h, largement en-deça du seuil de 250 grammes au-delà duquel les chaudières fioul ne seront plus autorisées à terme. La filière a lancé des essais avec le F10 et le F30 sous l’égide du bureau de normalisation du pétrole (BNPé), qui devraient arriver à terme en avril 2021, et déboucher sur une fiche technique fin 2021. Le F30 pourrait être prêt dès 2022, préfigurant la généralisation d’un F100, 100% renouvelable, à horizon 2040. Le F10, lui, pourrait être déployé rapidement, selon un calendrier qui doit être encore défini par les pouvoirs publics. « Alors que le gouvernement a annoncé l’interdiction des chaudières utilisant un fioul 100% fossile pour 2022, l’idée est d’accélérer la transition vers le biofioul F30 pour remplacer progressivement le fioul domestique actuellement en usage et, en 2040, s’y substituer intégralement », explique Eric Layly. Cette solution aurait un premier intérêt : préserver un mode de chauffage souple dans les zones rurales non desservies par le réseau de gaz.
Or 25 000 de nos 36 000 communes françaises sont dans ce cas. Les chaudières fioul sont en outre hybridables avec des pompes à chaleur pour améliorer leur performance. Mais au-delà, la FF3C défend aussi l’idée d’une filière française, du champ jusqu’à la chaudière. Un hectare de colza permet de produire à la fois 1000 litres d’huile transformée en biofioul mais aussi 1600 kilos de tourteau pour l’alimentation animale. « Ca répond à une question d’indépendance protéinique alors que la France importe aujourd’hui 45% de ses besoins en protéines végétales, principalement du soja d’Amérique du sud », plaide le président de la FF3C qui souligne aussi que la ressource française d’ester de colza suffit au F30. Le biofioul est déjà une réalité. Il reste une question clé, le coût. Car un baril de pétrole sous les 40 dollars rend le fioul domestique bon marché, mais accroît l’écart avec l’ester de colza. Un soutien public à cette filière propre permettrait de compenser ce différentiel tout en soutenant le développement d’un nouveau débouché pour les agriculteurs.
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