Vossloh Outreau sous haute tension énergétique

L'usine de composants d'appareils de voies ferroviaires s'apprête pour 2023 à un triplement ou quadruplement d'une facture qui pèse déjà plus de 10% de ses coûts. Elle a décidé de poursuivre son activité stratégique mais lance un appel aux pouvoirs publics.

 

Vossloh est un groupe équipementier ferroviaire allemand. Il compte 800 salariés en France dont une usine à Outreau (Pas-de-Calais), qui emploie un peu plus de 200 salariés. Le site, lancé en 1857, fabrique des composants d'appareils de voies, de cœurs de croisements et de traverse pour les voies ferrées. Ces pièces, qui utilisent du manganèse, sont hautement stratégiques pour la sécurité mais aussi pour l'alimentation de nombreuses usines dont elle fournit des composants indispensables.

Or le site va renouveler son contrat d'électricité dans quelques jours, et les perspectives sont celles d'un triplement voire d'un quadruplement de la facture. « On a vu arriver cette crise depuis quelques mois. On a travaillé avec les équipes à différents scénarios pour rester compétitifs. Mais on ne change pas la physique. Pour faire fondre de l'acier il faudra toujours des mégawatts... », explique Fabien Gali, directeur de Vossloh France. Et même si l'entreprise réfléchit déjà à un futur nourri par l'hydrogène, c'est une perspective de très long terme. L'énergie représente aujourd'hui plus de 10% du prix de revient, un ratio qui va s'envoler en 2023.

 

Productions stratégiques

Compte tenu du caractère critique des pièces produites à Outreau, le groupe allemand a décidé malgré tout de poursuivre son activité « avec un surcoût extrêmement important, mais pour maintenir un service et un savoir-faire » souligne le directeur général. Car les productions du site sont très stratégiques, à telle enseigne que l'Etat avait mis son véto au rachat de l'usine par un groupe chinois il y a une dizaine d'années. L'usine alimente aussi en pièces plusieurs autres sites de Vossloh. S'ajoute une dimension humaine puisque les salariés sont détenteurs d'expertises très pointues très difficiles à trouver sur le marché du travail. Et le groupe n'a guère d'alternative, car un transfert vers une autre usine du groupe, techniquement possible, prendrait en revanche au minimum deux ans et n'est donc pas une option.

 

Mais devant le choc financier, Vossloh souhaite que l'Etat clarifie aussi rapidement que possible ses critères d'éligibilité aux aides face à la crise. Car l'Etat consolide les sites dans son analyse, ce qui risque d'exclure l'usine d'Outreau du dispositif. Vossloh s'interroge aussi sur l'acceptation des clients opérateurs ferroviaires à encaisser des hausses de prix, alors qu'eux-mêmes et de nombreux acteurs sont soumis également aux surcharges énergétiques. Les difficultés conjoncturelles sont d'autant plus paradoxales que le secteur ferroviaire est quant à lui très porteur et vecteur de développement durable.