Didier Lockwood « Plus on s'e?loigne, plus on a besoin de ses origines »

Quand on a une carrière internationale, l'attache a? sa re?gion d'origine a-t-elle encore du sens?

D'autant plus ! Plus on s'e?loigne, plus on a besoin d'avoir le cœur rattaché à ses origines. Sinon, on se perd. Mon grand-pe?re e?tait de?ja? dessinateur en tulle a? Calais.

Comment voyez-vous votre ville aujourd'hui ?

C?a a change? e?norme?ment, surtout avec le tunnel. J'habitais tout pre?s de l'ouverture. Ma maison d'enfance et mon e?cole sont toujours la? mais mon horizon familial a bien change?, je ne peux pas dire en bien ou en mal... J'ai toujours e?te? sensible a? ce qui se passait dans ma ville. A un moment, on m'a me?me sollicite? pour me pre?senter a? la mairie! J'avais des ide?es, j'en ai toujours d'ailleurs. Mais on ne peut pas tout faire.

Calais commence a? trouver sa place dans l'univers culturel, non?

Oui, mais j'avais envie de redonner a? ma ville un e?lan sur le plan culturel, ce qui permet d'engendrer une dynamique e?conomique. Il faut faire apparai?tre les spe?cificite?s culturelles, ge?ographiques de cette ville. D'ou? ce festival avec mon ami Jean-Robert Lay, directeur du conservatoire de musique, qui a mis en place la gratuite? de l'enseignement musical, c'est ge?nial. Ce festival est fait pour cre?er l'e?ve?nement. Regardez Marciac, ce petit village qui a re?ussi en quelques anne?es a? se construire une cre?dibilite? remarquable avec son festival de jazz. C'est cette richesse humaine qui produit l'e?conomie, qui permet de rebondir.

Comment voyez-vous la fin de carrie?re annonce?e de Jean- Claude Casadesus a? l'ONL ?

Ce qu'il a fait, c'est extraordinaire. Il est parti avec rien, il en a fait un des plus beaux orchestres. C'est bien aussi de savoir passer la main. Ce qu'il a e?te? pour Lille, je l'ai e?te? pour Calais.

Quel est votre dernier coup de cœur litte?raire ?

C'est un livre d'Alejandro Jodorowsky, l'Echelle des Anges, qui est un livre extraordinaire de sagesse.

Et au cine?ma ?
Je travaille sur deux musiques de film, Abus de faiblesse, de Catherine Breillat, qui raconte son histoire de manipulation par Christophe Rocquencourt, et sur un autre film qui e?voque un boxeur des anne?es 30, Young Perez.

Qu'est-ce qui peut vous mettre en cole?re?

C?a m'arrive de moins en moins ! Ce que je n'aime pas, c'est la manipulation, j'ai horreur de c?a. Je de?teste la condescendance, le snobisme, la mauvaise foi.

Le snobisme dans le monde culturel est pourtant assez commun...

C'est pour c?a que je me tiens un peu a? l'e?cart. La politique aussi, tout ce qui fait re?fe?rence au pouvoir et a? la gloire, c?a me gonfle.

Avez-vous un morceau de musique fe?tiche?

J'en ai plusieurs. Mais ma re?fe?rence, c'est La Pavane pour une infante de?funte, de Ravel.

Y a t-il un endroit dans le monde que vous aimiez particulie?rement ?

Il y a plusieurs pays, j'e?tais au Venezuela re?cemment, au Bre?sil aussi et en Russie, j'aime voyager. Mais ce qui me de?sole, c'est que maintenant, partout on voit les me?mes magasins Carrefour ou Ikea, tout se ressemble...

Combien de temps par jour jouez-vous du violon?

Je n'en fais plus, je suis violon. Moins je travaille, moins je ta?cheronne, mieux je joue.

Si vous deviez e?tre parachute? sur une i?le de?serte ?

J'emporterais bien su?r mon violon. C'est mon confident.

Recueillis par O.D.