Deux expertises amiables permettent-elles d’éviter une expertise judiciaire ?
En matière de construction, les procédures sont souvent précédées d’une expertise judiciaire sollicitée par le demandeur afin d’établir au contradictoire des parties la réalité des désordres allégués, l’étendue du préjudice et les responsabilités encourues.
Le demandeur se fonde généralement sur un rapport d’expertise amiable qui établit l’existence de désordres, mais n’est pas suffisant, s’agissant d’une preuve que le demandeur se fait à lui-même. Le juge ne peut en effet prendre pour argent comptant les conclusions d’un rapport établi unilatéralement à la demande d’une partie. Le recours à une expertise judiciaire est alors souvent le seul moyen d’établir la preuve des allégations. Le demandeur assigne donc en référé expertise en invoquant l’article 145 du CPC.
Le juge considère en général qu’un rapport d’expertise amiable est un motif légitime pour conserver ou établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige. L’expertise est ainsi ordonnée, donnant alors lieu des mois d’expertise souvent onéreux dont le demandeur doit faire l’avance. Par un arrêt du 5 mars 2020, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a considéré que le juge ne peut pas refuser d’examiner un rapport établi unilatéralement à la demande d’une partie dès lors qu’il est régulièrement versé au débat, soumis à la discussion contradictoire et corroboré par d’autres éléments de preuve.
Que signifie la notion de « corroboré par d’autres éléments de preuve » ? En l’espèce, le demandeur avait produit deux rapports d’expertise amiable concordants. Les juges ont considéré que ces deux rapports avaient été soumis à la libre discussion des parties, qui pouvaient les contester et fournir une preuve contraire. Il n’y a donc pas eu recours à une expertise judiciaire proprement dite, le tribunal considérant pouvoir trancher le litige sur le fond et rendre un jugement.
Cet arrêt ouvre la possibilité à un demandeur d’agir directement au fond sans expertise judiciaire préalable, dans l’hypothèse d’absence de contestation technique ou de production d’un 3ème rapport contraire émanant cette fois du ou des défendeurs. Le tribunal reste néanmoins libre d’apprécier si les deux rapports d’expertise amiable sont une preuve suffisante lui permettant de trancher le litige.
Tout au moins, invoquer cette jurisprudence permettra peut-être d’accélérer le règlement de certains litiges.
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