Dans les coulisses d'AlterEos

Flandres Ateliers naît en 1991 sous la houlette d'Hervé Knecht. Cette société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) s'est lancée au départ dans le centre de relation clients, mais aussi le conditionnement, le tri et le contrôle qualité textile. Avec une dimension sociale très puissante puisque 85% des salariés aujourd'hui vivent un handicap. L'entreprise tourquennoise, rebaptisée AlterEos en 2010, a connu des fortunes diverses : difficultés commerciales en 2006, incendie en 2012 et pertes financières. Grâce à une stratégie de diversification et d'anticipation, elle a su rebondir et notamment devenir un des leaders français de la dématérialisation de documents, devenue son cœur de métier. Depuis 2013, l'entreprise est dirigée par Sylvie Cheynel. 

Interview Sylvie Cheynel, dirigeante d'AlterEos :
"Je voudrais sortir du cercle infernal des appels d'offre"  

Altereos est une entreprise adaptée au statut de Société coopérative d'Intérêt collectif. en quoi êtes vous différent ?

AlterEos est pleinement inscrite dans l'économie sociale et solidaire, avec une vocation de donner de l'emploi durable à des personnes fragilisées par le handicap. Toute la stratégie de l'entreprise est basée sur cette obsession de préserver voire de développer les emplois. Nous recherchons des activités économiques qui correspondent aux besoins présents et à venir de nos clients et prospects. Or nous savons qu'avec le déferlement de l'IA, nos clients vont changer. Je veux anticiper ces changements pour en faire une opportunité et pour ne pas les subir.

Que change votre statut coopératif ?

On n'a pas d'actionnaire à qui verser des dividendes. L'entreprise appartient à ses sociétaires : 80 salariés, des chefs d'entreprises, des personnes morales privées ou publiques, dont la Caisse d'Epargne, et peut être la mairie de Tourcoing bientôt. S'il y a des résultats, ils sont placés, après versement d’une prime d’intéressement, en totalité en réserve impartageable, ce qui consolide les capitaux propres de l’entreprise.

Avec 85% de vos salariés en situation de handicap, comment vous confrontez-vous à la concurrence ?

Nous sommes dans le secteur marchand classique : quelquefois on gagne, quelquefois on perd. Nous sommes parfois en concurrence avec des entreprises qui vont faire faire en Inde, à Madagascar à 4 euros de l'heure. Nous, on ne travaille pas à 4 euros de l'heure, autant vous le dire ! Avant AlterEos, j'ai créé le premier labo pharmaceutique français adapté, j'ai convaincu les groupes à nous confier des médicaments.
Ce qui m'inquiète, c'est le développement des appels d'offre, qui sont extrêmement stressants. Car la formation, l'accompagnement des gens est chez nous beaucoup plus large que dans une entreprise classique. Or, dans le cadre du renouvellement d’un appel d’offre, si on le perd, ce peuvent être 40 ou 50 personnes sans travail... Je voudrais sortir de ce cercle infernal, imaginer une JV sociale avec des entreprises du Nord, autour d'un produit ou d'une prestation co-commercialisée avec un partenaire dans la durée.

Vous présidez Altereos depuis plus de six ans. comment avez-vous imprimé votre marque ?

Je n'ai pas du tout le même mode de management qu'Hervé Knecht. Ca a un peu étonné les équipes, car si je pratique le management collaboratif, j'ai besoin de faire pour comprendre. J'ai beaucoup partagé pour bien m'imprégner de secteurs d'activités que je ne connaissais pas.

Par ailleurs, au moment où je suis arrivée fin 2012, j'ai du faire face à une perte, j'ai du restructurer pour faire des économies à tous les niveaux, et amener davantage de qualité. J'ai pu consolider la démarche Iso 9001 et lancer la certification 27001 relative à la sécurité de l’information. C'est différenciant car peu d'entreprises l'ont. Et aujourd'hui, je lance une activité de diversification, la restauration rapide, qui démarre ce mois-ci.

Avez-vous d'autres projets ?

Je veux travailler avec mes clients sur leurs besoins de demain. Notamment dans le domaine de l'économie circulaire. On travaille déjà avec La Vie est belt (concepteur de ceintures et nœuds papillon à partir de pneus et chambres à air usagés). De plus, si je vois bien les métiers qui vont disparaître, pour les métiers de demain, je veux bien qu'on m'aide !

A propos de soutien, avez-vous celui des collectivités ?

Nous avons l'aide de l'Etat compte tenu de la situation de nos salariés dont 85% relèvent de la MDPH et de l'entreprise adaptée. Nous n'avons pas d'autre aide sauf parfois celle de fondations. J'aimerais qu'elles puissent donner aux SCIC comme elles le font déjà aux associations. Quant à la clause d'insertion, les collectivités peuvent encore faire des efforts !

Recueilli par O.D.

AlterEos en bref

Création : 1991
Siège : Tourcoing
Chiffre d'affaires : 8 M€
Effectifs : 340 (56% de femmes) : 200 à la dématérialisation, 35 au conditionnement, 70 au centre d'appels, 20 dans les services support, 4 à la restauration rapide
Moyenne d'âge : 43 ans

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