Isabelle Dumas : La franc-tireuse de l'enseignement

Quinze jours après l'ouverture, une quinzaine d'élèves étaient déjà inscrits courant février. Un bon référencement Internet et le salon de l'Étudiant porte de Versailles ont suffi à amorcer le mouvement, "  plus rapide que prévu " , s'étonne même Isabelle Dumas. Le 1er février, la Cambrésienne a ouvert sa première agence Cours Ado à Paris, "  dans un local pas trop cher " , rue Fénelon, près de la Gare du Nord. C'est sa troisième agence en propre, après Cambrai en 1998 et Saint-Quentin en 2003 (5 salariés permanents au total). Mais sa 23e en comptant les franchisés. Car, sa méthode éprouvée et modélisée, Isabelle Dumas décide en 2009 de s'appuyer sur des indépendants pour la diffuser - "  La franchise, c'est un levier fabuleux pour un développement rapide ! " En deux ans, Cours Ado s'est hissé à la 6e place du marché du cours particulier, en pariant sur une implantation dans les villes moyennes. Une stratégie qui a permis à sa créatrice de conforter sa méthode avant de s'aventurer dans les grandes villes, sur le terrain de ses concurrents, les Acadomia, Legendre ou Complétude.

De méthode, Isabelle Dumas n'en manque pas. Elle a été prof de math pendant 13 ans. "  Un métier plus éprouvant qu'on ne pense ", raconte celle qui a eu peur de s'enfermer dans l'Éducation nationale. Passionnée par l'enseignement, elle trouve le milieu sclérosant - " je ne me voyais pas avec les mêmes habits pendants 50 ans. " Indépendante, elle voulait faire vibrer d'autres cordes à son arc. Et la voilà qui rempile à la fac pour une maîtrise de gestion à Dauphine, avec l'envie de " créer des instruments financiers ". Le hasard met sur son chemin Jean-Noël Bongrain, le magnat du fromage, qui souhaite ouvrir une chaîne aux États-Unis. Il l'envoie à Greenwich, Connecticut, pour monter le projet. Embrouillamini, l'affaire tourne court. Isabelle rejoint la case collège. Ennui. Dans ses classes très hétérogènes, elle n'arrive pas à faire progresser les élèves. Frustration.

En 1993 elle prend le taureau par les cornes et crée " Math Tremplin " à Cambrai, des cours de soutien en groupe. En classe la journée, en cours le soir et pendant les vacances, mère de deux enfants, elle travaille " 100 heures par semaine ". " Je voulais considérer les élèves autrement, les accueillir dans de beaux locaux, avec de belles tables, comme des cadres ! " D'abord seule, elle est rejointe par une prof de physique, puis d'anglais. Mais les cours en groupes montrent leurs limites. Timing parfait, Jean-Louis Borloo lui donne un coup de pouce en 1998 : TVA à 5,5%, 50% de réduction d'impôt, charges allégées pour les profs... Cours Ado pouvait naître.

L'enseigne est placée sous le signe du poisson rouge, qui " incarne l'ambiance sereine d'une maison ". Ses élèves, Isabelle Dumas veut les chouchouter, quelles que soient les difficultés. Pour les évaluer, elle laisse les QCM à ses concurrents ; son leitmotiv : comprendre pourquoi ça ne marche pas. Elle et ses franchisés s'entourent de profs triés sur le volet, diplômés d'une licence dans la matière enseignée et testés par une équipe de profs agrégés sur les connaissances, les programmes et la pédagogie.

La plupart sont des jeunes qui préparent le Capes - " ils ont le feu sacré ". Un bilan est établi à chaque cours et une enquête de satisfaction menée. Chaque agence dispose d'une équipe de 50 à 100 profs. A Paris, elle en recrute en ce moment quatre chaque semaine. Lyon doit ouvrir en franchise d'ici juin prochain, et six autres agences devraient être créée sur l'année. Le chiffre d'affaires global du réseau a doublé en 2011, à plus de 2 M€, et doublera encore cette année, prévoit la dirigeante.

Les " mauvais élèves ", elle en compte de moins en moins. " On leur presse moins le citron ! Le niveau des profs a monté, ils s'adaptent plus aux élèves, et l'informatique leur apprend beaucoup. " Un constat rassurant qui la conduit vers d'autres pistes  comme l'aide au devoir, l'aide à " l'excellence "... A 47 ans, Isabelle Dumas n'a pas fini d'entreprendre, mais sans ouvrir son capital : " on bénéficie de notre ancienneté, d'investissements payés, d'un modèle qui marche très bien... " Aucune raison de s'arrêter en si bon chemin.