Portrait : Antoine Hubert, dompteur de scarabées

A 38 ans, Antoine Hubert, le président d'Ynsect vient de conclure la plus grosse levée de fonds jamais réalisée par une entreprise française dans le monde agricole. Une consécration pour ce militant de la cause environnementale.
Il est des destins qui vacillent ; d’autres qui ne dévient jamais. Celui d'Antoine Hubert, le patron d’Ynsect, spécialiste français des protéines d’insectes, est de ceux-là. Petit, dans ses montagnes savoyardes, il admirait Allain Bougrain Dubourg, collectionnait les fiches sur la nature et chassait le papillon. Lycaenidés, nymphalidés et autre piéridés exerçaient sur lui une fascination qui allait finalement le conduire, plus tard, sur les bancs d’AgroCampus-Ouest, à Rennes. En 2005, le discret jeune homme en sort ingénieur et complète sa formation par un master en Ecologie et biodiversité à AgroParisTech. En France, l’avènement de l’agroécologie ou la 3e révolution industrielle n’est pas encore à l’ordre du jour. Antoine Hubert décide donc de repasser plus tard, le temps d’aller faire un tour aux Antilles, puis en Nouvelle-Zélande. Là c’est le choc. L’ingénieur découvre la technique du lombricompst, utilisant des vers de terre pour faciliter le recyclage des déchets ménagers. Pour lui désormais tout est clair : l’insecte et ses affiliés sont l’avenir de l’homme ! Ni une ni deux, à son retour en France, il crée avec une dizaine de militants l’association Wormgamic - ver et bio en anglais - pour promouvoir le compostage auprès des écoles, des collectivités ou des entreprises. Référente au sein de France Nature Environnement, l’as- sociation prend rapidement de l’ampleur et étend son champ d’action, en menant différents travaux de recherche.
Opus de “métal-musette”
« Un jour, un peu par hasard, on s’est intéressé au sujet des insectes qu’on a commencé par introduire dans des jeux pédagogiques », raconte Antoine Hubert. Impétueux, le trentenaire qui, à l’époque, a une « image négative car risquée » de l’aventure entrepreneuriale, est insatisfait. Pour lui, les interventions et les livres blancs de l’association, quoique utiles, ne répondent ni à l’urgence alimentaire ni climatique. « Avec quatre membres de l’association, on a donc décidé de passer à un autre stade », poursuit ce mélomane dans l’âme, bassiste à ses heures, et auteur d’un opus de « métal-musette » remarqué. Dès 2011, la petite équipe présente son idée dans différents concourset remporte quelques prix. Tout est à construire. Sans argent ni soutien... Qu’importe, les associés se « débrouillent », vivent sur leurs indemnités chômage et contractent trois prêts personnels de 30 K€ accordés par la région Ile-de-France pour soutenir la création d’entreprise. « Je viens juste de terminer de rembourser », s’amuse-t-il. On connaît la suite. Le concept séduit, des partenariats commerciaux sont noués, la première levée conclue, jusqu’à celle record de 372 M$ en octobre. Ynsect a grandi à la vitesse des larves de scarabée molitor qui ont fait son succès. Mais pas question pour Antoine Hubert d’y laisser son âme. Il ne perd pas de vue les valeurs qui ont prévalu à l’aventure, dont le respect de l’humain.
Pour les Ynsecters – les salariés d’Ynsect – l'entreprise a, par exemple, mis en place un congé paternité de 10 semaines. « La naissance de mes deux enfants a coïncidé avec nos deux levées de fonds. C’était difficile à vivre. C’est pourquoi, nous voulons créer un environnement épanouissant pour nos collaborateurs », confie le dirigeant, expliquant que d’ici la fin de l’année de nouvelles mesures « sociales » seraient présentées. La preuve qu'insecte ou pas, on appartient toujours à une colonie.
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