L'industrie régionale a encore perdu des emplois en 2018

Moins de chômeurs, mais aussi toujours moins d'emplois industriels. C'est ce qu'on retiendra du bilan économique 2018 de l'Insee.

Quand la mutation finira t-elle ? Une question aux accents darwiniens que l'on peut se poser à la lecture du dernier bilan économique réalisé par l'Insee pour 2018. Certes, les performances économiques du pays n'ont rien d'extraordinaire, l'emploi salarié augmentant de seulement 0,6%. Mais elles sont encore moins bonnes localement où le marché de l'emploi affiche une baisse de 0,1%, soit 2 400 emplois en moins. Euralis, Arjowiggins, Ascoval, Banania, Whirlpool... C'est l'industrie qui a payé le plus lourd tribut à la croissance molle : 2 400 emplois perdus en un an seulement, soit une baisse de 0,8% (+0,3% dans l'Hexagone).

Toutes les spécialités, y compris les matériels de transport et l'agroalimentaire, sont touchées. En particulier dans l'Aisne où la part de l'industrie dans l'emploi recule de 2,5% ! Ces mauvaises performances ont un autre impact : le recul, c'est un euphémisme, de l'intérim. 4000 postes en moins rien que dans l'industrie,- 5 800 au total. "Sur un an, l’emploi intérimaire diminue de 7,4 % dans la région, contre – 3,3 % au niveau national", constate l'Insee. De quoi donner à réfléchir à l'heure où le gouvernement souhaite durcir les conditions d'accès à l'assurance chômage... Les statistiques montrent que certaines catégories de demandeurs d'emploi restent en panne. Femmes, chômeurs de longue durée, plus de 50 ans : le triptyque est certes bien connu, mais sa situation a encore été aggravée par la baisse des emplois aidés. Dans les Hauts-de-France, les dispositifs d'appui ont reculé de 15,1%, contre -9,6% en France. Dans ce contexte, on en viendrait presque sur l'air de la Marquise de Ray Ventura, à se féliciter du recul global du chômage régional. Son niveau est en effet le plus bas depuis 10 ans, mais avec un taux de... 11%!

"Fin 2018, moins de 600 000 personnes sont inscrites à Pôle emploi, soit une baisse de 0,7 % cette année après une forte hausse en 2017", se réjouit l'Insee. Des secteurs permettent en effet à la région de sortir la tête de l'eau,tels la construction etle tertiaire marchand (hors intérim) qui ont créé 9 000 emplois en 2018. Mais là encore, l'embellie pourrait ne pas durer du fait d'un essoufflement de l'activité dans la construction.

Inégalités territoriales

En outre, les statistiques relatives à ces secteurs révèlent un autre problème, celui des inégalités territoriales. Les activités qui progressent le plus, comme le secteur de l’information et de la communication (+4,0%) ou les services aux entreprises (+ 2,5 %), sont essentiellement concentrés en zone urbaine. Notamment dans le Nord, où les technologies de la communication ont, par exemple, créé 1 300 emplois en un an. A contrario, des départements plus ruraux, comme la Somme ou l'Aisne, concentrent des activités à moindre valeur ajoutée, comme la logistique. Quant aux emplois agricoles, soumis aux aléas de la météo et des cours des grandes cultures, il est fort à parier que la baisse constatée depuis 2012 (-0,4% en région, +1% en France) va se poursuivre sur le long terme, même si 2018 a été stable (+0,1%). Reste à savoir comment rétablir l'équilibre entre centres métropolitains et espaces ruraux moins dynamiques. Après le "Paris et le désert français" de Gravier, parviendra t-on à éviter le Lille et le désert régional qui se profile ? Rien n'est moins sûr au vu des évolutions et des déséquilibres actuels.