Pour bien vieillir, agir en prévention doit devenir un enjeu prioritaire du nouveau quinquennat présidentiel

 

Une tribune co-signée par Frédéric Miquel (Directeur de Cabinet de la Carsat Hauts-de-France), Éric Boulanger (Professeur de Médecine et de biologie du vieillissement, Université de Lille), Frédéric Bloch (Professeur de gériatrie, Chef du service de gériatrie, Pôle Autonomie, au CHU Amiens-Picardie), Thibault Deschamps (Secrétaire général de l’Institut des Rencontres de la Forme – IRFO), Hervé Ovigneur (Directeur de l’Institut des Rencontres de la Forme – IRFO) et Florian Le Goff (Dirigeant de Kelindi)



Dix ans. Voilà le nombre d’années estimé par le Haut Conseil du Financement de la Protection Sociale pour parvenir à rétablir les comptes de la Sécurité Sociale1. Bien sûr, les effets de la crise sanitaire n’ont fait que plomber le « trou de la Sécu », alors qu’il était revenu à un quasi-équilibre en 2019. Mais le « quoi qu’il en coûte » n’est pas le seul responsable. Il y a un impératif à repenser les bases du modèle de santé français, majoritairement tourné vers le tout curatif, en privilégiant une politique de prévention, pour maintenir la santé de nos aînés.


Retarder l'arrivée de la dépendance

Il a été démontré que le gain d’une année de vie sans incapacité rapporterait 1,5 Md d’euros par an d’ici à 2031. Or, plus tôt on repère les signes de fragilité et plus on accompagne sa réversibilité, plus il est possible de tendre à l’allongement de l’espérance de vie en bonne santé, et par conséquent retarder l’âge de l’arrivée de la dépendance. L’idéal étant d’agir le plus tôt possible, à l’état de pré-fragilité, soit le stade de vieillissement dont la réversibilité est plus simple à opérer.

« C’est normal à votre âge », « On n’y peut rien ! » Quel individu entre 45 et 70 ans n’a pas déjà entendu ces expressions qui banalisent le vieillissement, voire qui rendent les gens fatalistes ? On estime que la (pré)fragilité touche 30 à 35% de la population française de cette classe d’âge, c’est-à-dire à un moment où elle ne se considère pas encore comme fragile ou âgée, mais qui, par son avancée en âge, son mode de vie et/ou son niveau socio-culturel, est susceptible, à court ou moyen terme, de perdre en capacités (physiques, cognitives, sensorielles, …), en mobilité, voire en autonomie pour certaines activités du quotidien.



La dépendance n’est pas une fatalité 

Rester autonome et vivre chez soi le plus longtemps possible est une priorité pour les Français si l’on en juge les résultats du 1er baromètre sur le vieillissement et le bien vieillir3. Mais si l'espérance de vie des Français est parmi les plus élevées d'Europe, ce n'est pas le cas de l'espérance de vie sans incapacité, autrement dit « en bonne santé » : à 65 ans, un homme français peut encore espérer vivre 19,4 ans, mais seulement 10,6 ans sans incapacité et 15,7 ans sans incapacité sévère. Il est donc nécessaire de créer les conditions propices au vieillir bien, en misant sur la prévention (le plus tôt possible dans la vie) et sur un accompagnement sur le long terme.


A titre d’exemple, le Danemark a fait du bien-être des retraités une priorité nationale. Plusieurs actions phares et engageantes y sont menées : incitation à pratiquer des activités de loisirs, création de centres de prévention dans les villes, visite médicale obligatoire dès 65 ans… Et cela a une incidence positive sur l’espérance de vie en bonne santé, puisqu’elle est de 11,9 ans à 65 ans (hommes et femmes confondus).

 

Auto-repérage


Sensibiliser les citoyens à l’auto-repérage, (in)former les médecins à la réversibilité de la fragilité : c’est là l’enjeu des prochaines années afin de répondre aux défis socio-économiques du pays et d’adapter le modèle social français à la donne du 21e siècle. Les citoyens ont un rôle important à jouer en matière d’auto-repérage, si tant est qu’on leur en donne les moyens ; tandis qu’à leurs côtés les professionnels de santé doivent eux aussi faire évoluer leur approche du vieillissement en bonne santé et leurs pratiques afin de favoriser le repérage, l’évaluation et l’accompagnement de la (pré)fragilité. 

Selon les chiffres de l’Insee, la part des personnes âgées d’au moins 65 ans, en France, a progressé de près de 5% en 20 ans, atteignant 20,5% de la population, soit près d’une personne sur cinq. Il devient urgent d’agir. Nous faisons un appel à mobilisation auprès de tous les acteurs du champ sanitaire et médico-social à opérer un travail d’acculturation au changement pour anticiper demain en préparant dès maintenant de nouvelles fondations propices à un vieillissement réussi.



1 https://www.gouvernement.fr/partage/12641-remise-du-rapport-du-haut-conseil-du-financement-de-la-protection-sociale

2 Source Insee

3 http://www.odoxa.fr/sondage/grande-enquete-sur-le-vieillissement-rester-autonome-est-lenjeu-numero-1-des-societes-europeennes/

4 https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/

5 EVSI – Espérance de vie sans incapacité à la naissance

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