Abandon de poste et démission : une liaison dangereuse ?

Bruno Platel, avocat associé chez Capstan Avocats à Lille Bruno Platel, avocat associé chez Capstan Avocats à Lille

Dans le cadre de l’examen en première lecture du projet de loi à l’Assemblée Nationale portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail, un amendement largement médiatisé prévoit que le salarié qui a abandonné « volontairement » son poste et ne reprend pas le travail après mise en demeure de l’employeur est réputé démissionnaire.

De son côté, l’employeur devra justifier avoir mis en demeure le salarié de reprendre son travail par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge, cette seconde modalité de mise en demeure interpellant le praticien s’agissant d’un salarié qui a abandonné son poste !

L’adoption de cet amendement vise clairement à exclure le droit du salarié à l’indemnisation chômage en créant dans cette hypothèse spécifique une présomption de démission. Le texte n’a donc ni pour objet, ni pour effet de sécuriser l’entreprise pouvant être de plus en plus souvent confrontée à la situation de salariés qui ne se présentent plus au travail sans aucune information, ni justification de la durée et de la cause de leur absence et donc de la date de leur retour.

Si cet amendement a été largement critiqué en ce qu’il serait susceptible de créer une certaine précarité du salarié, force est de constater que la réforme envisagée emporte une sécurisation très relative de l’entreprise.

En effet, et en premier lieu, l’amendement exclut l’application de cette présomption lorsque l’absence du salarié est liée à des problèmes de santé ou de sécurité. L’imprécision de ce texte laisse ainsi place à des interprétations assez divergentes sur les cas où le salarié pourra obtenir l’exclusion de cette présomption.

Plus fondamentalement, l’application de cette présomption emporte le droit du salarié de saisir le Conseil de Prud’hommes pour obtenir la requalification de la rupture de son contrat de travail.

S'il peut écarter l’application de cette présomption de démission, on peut craindre en l’absence de précision du texte que la rupture du contrat de travail soit alors requalifiée en licenciement avec a minima le corollaire du versement de l’indemnité de licenciement et du préavis, voire des dom- mages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En synthèse, il n’est pas certain que cet amendement, s’il était adopté définitivement, réduise les situations d’abandon de poste. Au-delà, se posera la question pour l’entreprise de l’attitude à adopter et de l’opportunité de prendre l’initiative en pareille hypothèse d’un licenciement pour faute grave pour réduire le risque prud’homal.

Ces articles peuvent également vous intéresser :

Jean-Pierre Letartre, président du Comité Grand Lille et d'Entreprises et Cités.
Publié le 26/09/2022 Tribunes libres

Être Bruno aujourd'hui

"Être Bruno, c'est voir grand, ensemble, sur le long terme".

Alexis Roquette, directeur associé Quintesens.
Publié le 26/09/2022 Tribunes libres

Qu'il est bon de rire !

"Rire représente un véritable accélérateur d'échanges et de stimulation créative".

Julien Meunier, associé KPMG.
Publié le 26/09/2022 Tribunes libres

Sécuriser sa situation fiscale avec l'ECF !

"L'ECF permet aussi de renforcer la relation de confiance avec vos partenaires bancaires ou commerciaux".

Bruno Platel, avocat associé chez Capstan Avocats à Lille
Publié le 26/09/2022 Tribunes libres

Harcèlement : des précisions utiles relatives à l'organisation des enquêtes

"Le respect des droits de la défense n'impose pas que le salarié ait accès au dossier (...) ni même qu'il soit entendu."

Alexandre Ghesquiere, avocat associé chez Bignon Lebray.
Publié le 26/09/2022 Tribunes libres

Salarié actionnaire : le rachat des actions en cas de départ de celui-ci

"Diverses clauses sont à prévoir dans le pacte qui liera le salarié et la société mais la clause dite de good et bad leaver doit être rédigée avec la plus grande prudence."

Bruno Platel, avocat associé Capstan Avocats.
Publié le 26/08/2022 Tribunes libres

Loi sur le pouvoir d'achat : les principales mesures

"La loi instaure en premier lieu une prime de partage de la valeur très largement inspirée de la prime Macron."

Delphine Nowak, avocat associé Bignon Lebray.
Publié le 26/08/2022 Tribunes libres

Voisinage et construction

"Mieux vaut toujours éviter un procès qui serait inévitablement long et couteux et tenter une négociation."

Rebecca Fray, consultante et coach professionnelle Quintesens.
Publié le 26/08/2022 Tribunes libres

Pourquoi et comment oser dire "non" ?

"Apprendre à dire non, c’est apprendre à s’affirmer".

Arnaud de Coninck et Sylvain Souil, référents Lean KPMG Nord
Publié le 26/08/2022 Tribunes libres

Quelle place pour le lean management en entreprise ?

"La méthode a fait ses preuves dans une démarche d’amélioration continue avec pour résultat d’accroître la performance de l’entreprise."

Jérôme De France plaide pour que les pme aillent challenger les leaders et jouent leur part dans la sauvegarde du pouvoir d'achat des Français par le jeu de la concurrence. (Photo France Toner)
Publié le 12/07/2022 Tribunes libres

Pouvoir d'achat : PME, osez “bousculer” les leaders pour faire bouger les marchés !

Jérôme De France, président de FranceToner, juge que les Pme ont leur rôle à jouer pour proposer des prix bas dans tous les secteurs face à des grandes marques chères, à l'heure où l'inflation galope.