"On est les petites mains de la VAD"

"Les choses sont écrites." A force de coïncidences, Francis Ciuch est arrivé à cette conclusion que, dans la grande roue de la vie, il n'y a pas de hasard. Son entreprise se sentait à l'étroit dans des locaux mal adaptés à sa croissance et à son image. Sur l'axe A1, de plus en plus logistique, on lui faisait les yeux doux. "Michel-François Delannoy m'a dit “je ne vous laisserai pas partir”." Avec LMCU, la SEM Ville renouvelée et l'architecte Pierre Coppe, le projet se resserre alors sur l'ancien peignage La Tossée, fermé en 2003. Un signe du destin. Les grands-parents paternels de Francis Ciuch, venus d'Ukraine, ont habité à deux pas. L'année 1932 qu'arbore la cheminée de La Tossée est l'année de naissance de son père. Le nom Ciuch se prononce "tchour" en ukrainien, qui signifie "fringue"... "L'histoire nous rattrape." Et elle se perpétue ; au moment où l'acquisition du nouveau site était signée un fils était conçu, attendu depuis 15 ans... "Un cadeau du ciel !"

"Je me suis retrouvé tout nu"

La réussite de l'entreprise, elle, doit plus au labeur qu'à la providence. Avec un CA de 9,5 M€ sur le dernier exercice, les trois entités de Ciuch – Solution, Industrie et Service – emploient 80 salariés, dont 25 dans le bureau d'études qui réunit des compétences en mécanique, automatisme, électrique et informatique. Francis Ciuch a développé l'activité en répondant "de plus en plus loin" aux besoins de ses clients. Il affiche pour La Redoute un traitement record de 200 000 colis par jour et une ligne de convergence à 6 000 colis l'heure pour Vert Baudet. "On est les petites mains de la VAD, sourit le Pdg. Il y a des économies énormes à apporter, et du gain en qualité."

L'entreprise a fait du chemin depuis 1966. Le père de Francis Ciuch fabriquait des machines pour ramasser, cribler et ensacher le charbon. Juste à côté, la VPC se développait – "j'ai grandi avec le Vert Baudet", se souvient le dirigeant. Quand la crise touche les houillères, son père se tourne vers le vépéciste et la fabrication de convoyeurs électrifiés. Avec son frère Jean-Pierre, ingénieur, il rejoint l'entreprise en 1983. De trois salariés alors, ils sont 90 en 1999. Cette année-là, Jean-Pierre décède brutalement ; son père était mort trois ans plus tôt. La société 3i créée par son beau-frère pour développer le guidage informatique quitte alors le navire, vendue à Savoye, principal concurrent de Ciuch... "Je me suis retrouvé tout nu", raconte celui qui a trouvé la force de retrousser ses manches. Il entame une formation en management, bâtit sa stratégie et recrée la partie informatique WCS, "une compétence fondamentale".

Des cinq objectifs qu'il s'était fixés, il vient, à 50 ans, de réaliser le dernier : déménager. "Pour travailler avec les grands, il faut s'en donner les moyens." Résultat : un investissement de 4,5 M€ pour 4 000 m2 d'ateliers articulés avec trois plateaux de bureaux de 350 m2 chacun – dont un proposé à la location.
Francis Ciuch détient 100% du capital de l'entreprise et n'entend pas que cela change. Pour grossir, il songe à un partenariat industriel qui lui apporterait des complémentarités techniques et géographiques. En attendant, un gros projet de trieur est à l'étude pour Damart. Une dizaine d'embauches sont prévues à trois ans, pour accompagner une croissance estimée à 8-10% par an. "Un nouveau départ."