Alcide : une vieille formule parisienne importée et réussie

La brasserie Alcide change à nouveau en profondeur. Le très bel établissement situé à deux pas de la Grand'Place de Lille réinvente le vieux principe du bouillon. Avec succès.

En 2018, Olivier Delannoy avait sauvé, en la reprenant (ECO121 n°85), la dernière belle grande brasserie historique (avec la superbe brasserie André) dont Lille pouvait s’enorgueillir : grande salle rectangulaire art déco, miroirs, fresques murales, haut plafond à verrière, banquettes de velours rouge. Avec Thomas Delgado, il vient d’en changer la proposition en la renommant Bouillon Alcide.

Inaugurée fin octobre, la formule, importée de Paris où les traditions sont plus vivantes, remporte déjà un vif succès. Il s’agit d’un vestige du XIXe siècle, quand la grandiose transformation de la capitale par Napoléon III avait vu arriver des dizaines de milliers d’ouvriers qui devaient se nourrir à petits prix. A l’époque comme aux précédentes, la base de l’alimentation ordinaire était le bouillon. L’idée entretenue par Chartier à Paris est devenue synonyme d’endroit populaire, de plats simples et de petits prix. S’y est ajoutée par la force des choses une notion de lieu évocateur du passé. En aucun cas, il n’a été synonyme de haute gastronomie, ni de soirée en amoureux. Mais si Chartier à Paris, sous ses seulement 4 propriétaires a pu maintenir un succès non démenti, et servir plus de 50 millions de repas en quelque 100 ans, c’est grâce à un grand professionnalisme fait d’authenticité, de constance, de rigueur, et d’attention aux clients. Cet esprit traditionnel, Le Bouillon Alcide le reprend dans sa carte, sans menu, avec 9 entrées et 9 plats qui changent en fonction des opportunités du marché.

Nous avons commencé, lors de notre expérience, par un réconfortant bouillon (2,10 €), puis une terrine artisanale, goûteuse, mœlleuse, avec un bon hachage à gros grains (4,40 €) ; un museau de porc vinaigrette (4,90 €), moins avantageux qu’un museau de bœuf difficile à trouver, a fait l’affaire. En plats, la saucisse purée (9,90 €) est très correcte avec une purée qui n’a pas le goût de réchauffé ; le chicon au gratin, pommes vapeur (8,80 €), copieux, lui, ne fut pas très convaincant avec son endive sèche et une béchamel fade ; les tripes au vin blanc (9,20 €) sont en fait de porc avec des frites à la pelure, et pourraient être plus relevées ; la tête de veau (11,90 €) est bien servie par une vraie sauce gribiche et de beaux légumes, carotte, navet, poireau, à cuisson juste. Pour les desserts, une mousse au chocolat (4,20 €) ou une tarte au sucre (3,90 €) éviteront des déconvenues (framboisier). Côté boissons, si le choix de bières est remarquable (Jupiler, Angelus et Anosteke à la pression), les vins sont vraiment le parent pauvre de la formule : seulement trois rouges du sud-ouest ; en la matière, il y a des régions plus généreuses, facile de faire mieux! Le gentil service, preste et enjoué, a fort à faire ; il est d’une bonne humeur ni feinte ni surjouée. Et au vu de la salle, joyeuse et insouciante, il est rassurant de constater qu’un large public jeune réponde avec enthousiasme à une cuisine traditionnelle, simple et sans prétention de la « réinventer ». Au Bouillon Alcide de veiller à ne pas le décevoir.

Le Bouillon Alcide

5 rue des débris Saint-Etienne, Lille

03 20 40 80 00

11h45-15h ; 18h45-22h - Fermé dimanche soir et lundi

Carte 14 à 26 €

www.alcidelille.com 

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